Styliste et créateur de mode, Hissein Adamou Camara, dont l’atelier est situé sur l’avenue Zezerty dans le 4ème arrondissement, est une référence dans le domaine de la haute couture, de la mode et du mannequinat au Tchad.
Plus connu sous le nom de Camara, qui est aussi son label, il accueille ses visiteurs qu’il plonge dans son univers, où ses créations en vente sont exposées. “La couture à un avenir promoteur, mais demande beaucoup de travail et d’éducation, surtout ici au Tchad. Jusque-là, les gens ne s’ouvrent pas et n’arrivent pas à faire la différence entre la tenue de créateur de mode et un prêt à porter du marché”, explique t-il. Selon Camara, c’est maintenant que quelques personnes commencent à découvrir le beau, et arrivent à faire la différence entre les tenues de marque et celles qui viennent de partout. La mode est un métier qui absorbe beaucoup de main-d’œuvre et en elle-même, regorge plusieurs corps de métiers. Il faut assister aux défilés qu’organisent les créateurs de mode pour se rendre à l’évidence. Economiquement, c’est un secteur qui peut créer de la valeur ajoutée, s’il est soutenu et accompagné. Il peut aider la filière coton à fleurir, la jeunesse à se spécialiser dans les techniques de tissage, de teinture, de filature, de gestion de lumière et son dans l’événementiel de façon général. “La mode est aussi un art de spectacle. Elle contribue au cinéma pour avoir un certain nombre de contenu assez visible. Il y a beaucoup de spécialités dans la mode qu’il faudrait vraiment implanter, structurer et enseigner, afin que la jeunesse puisse s’en approprier et en faire un facteur de production de la valeur ajoutée”, souhaite Camara.
Néanmoins, ce dernier reconnait que ce n’est pas facile de s’en sortir, à cause de l’accès aux matières premières, qui demeurent une grande difficulté pour la filière de la mode. Les couturiers, stylistes et créateurs de mode importent des tissus indiqués, afin de travailler sur les divers thèmes de la ligne de créativité. En fin d’année 2020, le défunt chef de l’Etat Idriss Déby Itno, lors de l’inauguration de l’usine de textile de Sarh, a annoncé l’interdiction d’importation de tout type de tissus, parce qu’ils seront produits sur place. Une annonce qui avait alerté les créateurs de mode, au point ou Hissein Adamou Camara, en qualité de président des professionnels de couture du Tchad, avait écrit au chef de l’Etat, pour relever l’ampleur des difficultés à venir pour le secteur de la couture, au cas où cette déclaration venait à être exécutée. Quelle que soit la taille de l’usine, elle ne va pas avoir toute la configuration nécessaire pour produire tout type de tissus dont a besoin le secteur de la mode. Et avec les difficultés occasionnées par l’apparition de covid-19, il est plus facile pour les gens de se tourner vers la friperie ou les prêts à porter de bas de gamme. Ce qui va créer un manque à gagné à l’Etat et aux secteurs de la couture, argumente le styliste.
Chercher toujours la perfection
La particularité de Hissein Adamou Camara qui le différencie des autres, est sa marque et sa touche spéciale: “Mes tenues sont de haute couture, avec mes signes distinctifs qui sont toujours imprimés dessus. Que ce soit le super moulant ou super léger, je réussis à broder en multipliant un peu les couleurs, à tel point que dès que tu les vois, tu sens tout de suite que ça vient de Camara. Pour les chemises, on utilise des cotonnades, du lent ou encore du wax, mais il y a toujours ma griffe qui accompagne. Pour ceux qui connaissent déjà le style de la maison, ça leur saute aux yeux”, se vante-t-il.
Préoccupé par la concurrence occidentale et orientale, avec ses prix moins chers, Camara essaye, en fonction des situations qui se présentent, de développer des stratégies de vente, en communiquant autour de ce qu’il crée. “Les créateurs de mode travaillent plus avec les média, les acheteurs, et aussi ceux qui aiment le spectacle. Nos clients se trouvent forcément dans les milieux soit de l’événementiel, de la communication écrite, orale ou encore audiovisuelle. Nous faisons de la haute couture et cela ne se trouve pas dans les prêts à porter. C’est pourquoi, il faudrait le présenter à un public. Cela nous permet d’exposer nos talents, à travers les matériaux que sont le ciseau et l’aiguille. Le défilé de mode est en quelque sorte une plateforme d’expression qui permet au créateur de pouvoir exprimer son savoir-faire et aller au-delà de l’habit porté. Quand l’idée de création est là, on essaie de chercher la personne qui peut mettre en valeur notre création. Pour présenter cela en photo, on choisit les personnes qui ont le profil capable pour vendre. On ne peut pas habiller n’importe qui, du coup, nous essayons de faire la différence entre les mannequins qui peuvent faire le podium ou la photo et ceux qui font les deux.
Pour les femmes, nous identifions trois types de mannequin (celle qui sont élancé de grande taille, la femme pulpeuse avec beaucoup de rondeur, et la femme fatale qui a de l’allure). Chez les garçons, nous prenons ceux qui sont un peu élancé et virile, pour pouvoir montrer le travail que nous mettons en valeur. Tout le monde ne peut pas être mannequin, mais il y a des gens qui ont naturellement le profil ” précise le styliste et créateur de mode. Pour lui, si le mannequinat n’évolue pas, c’est à cause du manque de leadership des structures qui forment et gèrent les carrières. Camara affirme que le Tchad est encore à la phase d’apprentissage de la mode. “Former des gens à apprendre à mettre leur corps à la disposition du créateur de mode, n’est pas chose facile. Et les pesanteurs socioculturelles font que le métier ne décolle pas et quand on est nouveau sur le marché de la mode, il est difficile d’entrer vraiment dans la vraie mode pour se vendre. Sinon, les mannequins tchadiens peuvent très bien aller se vendre ailleurs”. Camara veut mettre un peu du sang neuf dans le mannequinat, en essayant de faire un travail académique, à travers des castings qui ont été organisé a cet effet. L’objectif est de renouveler le corps du mannequinat tchadien, afin de les rendre compétitifs à l’international. Il annonce l’ouverture d’une académie cette année 2021. La mode est une discipline qui s’assied en vieillissant dit Camara, auteur de plusieurs distinctions dont le prix numérique du stylisme en 2017 et celui du meilleur créateur Tchadien en 2016. Modeh Boy Trésor
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