Cette loi de 33 pages, éditée en format livre de poche, comporte 64 articles subdivisés en 4 titres et 7 chapitres. Elle est vulgarisée par l’Association pour la réinsertion des enfants et la défense des droits de l’homme (Ared).
Au titre I des dispositions générales, le chapitre I traite de l’objet et du champ d’application. Le chapitre II avec son seul article 5, traite des définitions : traite des personnes ; abus d’une situation de vulnérabilité ; agent public ; contraintes ; enfant ; tromperie ; exploitation de la personne ; personne à charge accompagnant la victime de traite ; transporteur commercial ; victime de la traite.
Au titre II Des incriminations et sanctions, le chapitre I parle de la traite des personnes et la section I (article 6 à 14) fait référence à l’infraction de la traite des personnes. La section II (article 15 à 23) traite des infractions d’exploitation. La section III (article 24) traite des infractions propres aux transporteurs commerciaux. La section IV (article 25) des infractions relatives aux documents de voyage. Le chapitre II (article 26) traite des infractions relatives à la violation du secret professionnel. Le chapitre III (article 27 à 32) des dispositions spéciales. Le chapitre IV (article 33 à 37) des perquisitions, des saisies, du gel et de la confiscation.
Le titre III de l’identification, de la prévention, de la protection et de l’assistance aux victimes, témoins et dénonciateurs de la traite des personnes, le chapitre I parle des dispositions procédurales (article 38). Le chapitre II parle de l’organe de lutte contre la traite des personnes (article 40), le chapitre III de l’assistance aux victimes (article 41 à 45). Le chapitre IV de la protection des victimes, des témoins et des dénonciateurs (article 46 à 47). Le chapitre V de la réparation aux victimes (article 48 à 49). Le chapitre VI de l’immigration et du retour des victimes (article 50 à 57). Le chapitre VII des mesures aux frontières (article 58 à 59).
Le titre IV traite de la coopération internationale et nationale (article 60 à 61), et le titre V des dispositions finales (article 62 à 64).
C’est à travers le projet “Renforcement de la lutte contre la traite des personnes dans le Mandoul” financé par l’ambassade des Etats-Unis d’Amérique, que cette loi est éditée et dupliquée dans le but d’être vulgarisée. L’objectif de ses promoteurs est de la mettre à la disposition des autorités administratives, traditionnelles, des magistrats, des intervenants dans la chaîne de protection des enfants, de la Commission nationale des droits de l’homme et même au ministère de la Justice. Malheureusement, constate Alkoa Ngar, le coordonnateur de l’Association pour la réinsertion des enfants et la défense des droits de l’homme (Ared), son applicabilité pose problème. Il situe que “c’est une loi qui est très bien ficelée. C’est à partir des actions de plaidoyers menées pour parler de la traite des personnes en général et des enfants en particulier au Tchad que cela a été officiellement reconnu. Malgré cela, il y avait un vide juridique, parce qu’il n’y avait pas une loi qui condamne la traite des personnes. Il a fallu une pression des Etats-Unis sur le gouvernement tchadien, pour qu’une loi soit adoptée, sous réserve de sanction économique”. Le coordonnateur de l’association poursuit que l’assemblée nationale a adopté la loi le 30 avril (ordonnance 06) et le 20 juin 2018, le chef de l’Etat l’a promulgué. Mais qu’a-t-on fait de cette loi ? Comme beaucoup d’autres chez nous, elle est restée dans les tiroirs. Une copie a été envoyée au partenaire et puis c’est tout. Sur toute l’étendue du territoire national, aucun magistrat n’a été informé. “C’est à travers les partenaires que nous avons eu une copie de cette loi en version électronique. A chaque fois que nous parlons de cela, lorsque nous portons plainte, les magistrats étonnés nous demandent souvent où est-ce que nous avons trouvé cette loi. Ainsi, chaque fois que nous déposons une plainte, nous l’imprimons pour leur remettre. Cela, depuis Sarh jusqu’à Abéché. Maintenant à travers ce projet, nous avons pu éditer cette loi, qui est en train d’être vulgarisée. C’est une loi qui doit aider à faire avancer les choses, parce qu’elle a également prévu la mise en place d’une commission nationale de lutte contre la traite des personnes, qui doit faire un travail de prévention, de poursuites des auteurs et d’assistance victimes dans la réinsertion de la vie active”. Malheureusement, relève Alkoa Ngar, cette commission n’est pas mise en place par manque de volonté politique. “Le Tchad est devenu une plaque tournante dans la traite des personnes et c’est une situation assez grave qui est pourtant très bien connue. Les victimes sont recrutées généralement dans l’ancien Moyen-Chari, les deux Logone, la Tandjilé, le Mayo-Kebbi et le Chari-Baguirmi”. La ville de N’Djaména est une plaque tournante pour le recrutement et l’exploitation. “Nous avons enregistré des cas de traite aussi dans le Guéra. Ces victimes sont exploitées un peu sur l’ensemble du territoire national, mais aussi dans les pays voisins, notamment la Libye, le Soudan, la Rca, le Cameroun, le Niger et le Nigeria. Ces responsables esclavagistes sont des généraux, des colonels, des ministres et gouverneurs, qui détiennent des troupeaux d’animaux, gèrent l’exploitation de l’or, les travaux ménagers dans les jardins et autres. Mais comme cela leur profite, on fait table rase sur cette loi. Cela doit plutôt interpeller les autorités investies des pouvoirs, pour protéger la population, sinon les plus faibles seront exposés contre les abus, mais ce n’est pas le cas. Cette loi est en vigueur et applicable, mais c’est comme si elle n’existe pas”, déplore Alkoa Ngar.
Roy Moussa