Couvrir autrement le trafic illicite des migrants et la traite des personnes

L’Organisation internationale pour les migrations (Oim) a organisé une session de formation sur le trafic illicite des migrants et la traite des personnes à l’attention des journalistes de différents organes de presse, le mercredi 29 septembre 2021 à la Maison des médias du Tchad.

La formation a porté sur les différents outils de prévention et de protection des migrants ainsi que l’orientation sur les bonnes pratiques de couverture des cas de trafic illicite des migrants, la traite des personnes au Tchad, la vulgarisation du Mécanisme national de référencement (Mnr) et les procédures opérationnelles standards (Pos) relatives à la protection et l’assistance des victimes de la traite des personnes en République du Tchad. D’entrée de jeu, le responsable de l’unité protection et assistance des victimes de la traite des personnes à l’Oim, Jean-Claude Bashirahishize, a rappelé les instruments internationaux ratifiés par le Tchad et ceux mis en place pour les domestiquer en vue de leur application selon le contexte tchadien. Pour lui, le Tchad est l’un des rares pays qui a su se doter des outils de protection des migrants les plus salvateurs. Il s’agit de la ratification du protocole de Palerme sur la traite des femmes et enfants le 18 août 2009, la loi 12 ratifiant l’ordonnance 006/PR/2018 portant sur la traite des personnes, le décret n°151/PR/MJDH/2021 fixant la composition de la Commission nationale de lutte contre la traite des personnes, l’arrêté n°25/PR/MJDH/DG/SDGAPG/2021 portant création du Comité multisectoriel contre le trafic illicite des migrants et la traite des personnes (Ctm) suivi du Mécanisme national de référencement et procédures opérationnelles standards.

 

Pourquoi un briefing sur la traite des personnes pour les médias

Jean-Claude Bashirahishize trouve que “le rôle des médias est primordial pour soulever les questions de la traite des personnes auprès du grand public, amener la société à réfléchir aux causes qui sous-tendent la traite des êtres humains, à comprendre pourquoi et comment cela fonctionne”. C’est pourquoi, “si les journalistes informent le public, ils œuvrent à la fois à prévenir le recrutement de potentielles victimes, à prévenir les potentiels auteurs des risques qu’ils encourent, et à mobiliser les acteurs institutionnels et la société civile pour qu’ils se saisissent des questions, tant pour participer à la sensibilisation, assister les victimes que pour poursuivre les coupables”.

 

Trafic illicite des migrants et traite des personnes, quelle différence ?

Le trafic illicite désigne à l’article 3 du protocole de Palerme visant à prévenir, punir et réprimer la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, additionnel à la Convention des Nations unies contre la criminalité transnationale, “le fait d’assurer, afin d’en tirer, directement ou indirectement, un avantage financier ou autre avantage matériel, l’entrée illégale dans un pays Etat partie d’une personne qui n’est ni un ressortissant ni un résident permanent de cet Etat”.

Du même article, la traite des personnes désigne “le recrutement, le transport, le transfert, l’hébergement ou l’accueil des personnes, par la menace de recours ou le recours à la force ou à d’autres formes de contrainte, par enlèvement, fraude, tromperie, abus d’autorité ou d’une situation de vulnérabilité, ou par l’offre ou l’acceptation de paiements ou d’avantages pour obtenir le consentement d’une personne ayant autorité sur une autre aux fins d’exploitation. L’exploitation comprend, au minimum, l’exploitation de la prostitution d’autrui ou d’autres formes d’exploitation sexuelle, le travail ou les services forcés, l’esclavage ou les pratiques analogues à l’esclavage, la servitude ou le prélèvement d’organes”. Les éléments de différenciation sont ainsi, au niveau du caractère transfrontalier du trafic illicite des migrants, le consentement du migrant, le manque d’exploitation, etc. alors que la traite des personnes n’est pas forcément transfrontalière, l’exploitation est le but, la victime est trompée, menacée, etc., explique Jean-Claude.

Et il renchérit que trois éléments sont à prendre en compte dans le cadre de la traite des personnes. “Toute personne, journaliste ou non, doit vérifier s’il y a un acte posé par une tierce personne sur une autre (victime) tels que transport, transfert, hébergement, … vérifier s’il y a eu des moyens par la menace de recours ou recours à la force ou d’autres contraintes, par enlèvement, fraude, tromperie, …  définir le but, c’est-à-dire les fins d’exploitation de la victime. Il peut s’agir de l’exploitation de la prostitution d’autrui ou d’autres formes d’exploitation sexuelle, le travail ou services forcés, … C’est lorsque tous ces éléments sont réunis que l’on peut parler de traite des personnes.  Sauf pour les cas des enfants où qu’il y ait moyen ou pas, il y a traite des personnes lorsqu’il y a un acte et un but”, a-t-il souligné.

Le “Mécanisme national de référencement et les procédures opérationnelles standards”, c’est un manuel qui élucide de manière détaillée les différents aspects liés au trafic illicite des migrants et la traite des personnes au Tchad. Il propose aussi les canevas pour les endiguer à travers les 4P, notamment, la prévention de la traite en République du Tchad, la protection et assistance aux victimes de la traite des personnes, la poursuite des trafiquants et le partenariat au niveau national et international.

Pour prévenir la traite des personnes, protéger les victimes, poursuivre les auteurs, tout le monde doit s’impliquer, a-t-il conclu.

Minnamou Djobsou Ezéchiel