Eternel recommencement. Le contrôle des véhicules à vitres fumées ou sans plaque minéralogique pris par arrêté ministériel le 21 mai 2021 risque de ressembler à d’autres qui n’ont pas donné des résultats escomptés. On en exclut certains pour soumettre d’autres citoyens.
L’interdiction de circulation des véhicules à vitres fumées et sans plaque prise par arrêté du ministre en charge de la Sécurité publique le 21 mai 2021 n’est qu’une redite. Rien de nouveau. A maintes reprises, des contrôles pareils ont été effectués sous le régime du feu Idriss Déby Itno, sans circonscrire le fléau qui semble en ce moment préoccuper les nouveaux tenants du pouvoir. En somme, le commun des mortels tchadiens connaît qui, sous nos cieux, utilisent de tels engins. Ce qui surprend quelque peu, ce sont les pas exactement posés par feu père Déby Itno, sans réussir, sur lesquels marche le fils général de corps d’armée, Mahamat Idriss Déby Itno, président du Conseil militaire de transition (Cmt). Il s’agit du deux poids, deux mesures que tente vaille que vaille d’instituer le Cmt depuis le 20 avril, date de sa prise du pouvoir. Et ce n’est nullement une élucubration d’un journaliste, car l’arrêté du ministre de la Sécurité publique interdisant la circulation de ces engins soutient à fond cette observation.
Pourtant, l’article 7 de la charte de transition stipule clairement que “Les Tchadiens des deux sexes ont les mêmes droits et les mêmes devoirs. Ils sont égaux devant la loi sans distinction de race, d’origine et de religion”. Or, l’arrêté du ministre pris contre “la criminalité de tout genre, enregistrée ces derniers temps”, ne l’entend pas de cette oreille. Alors qu’il devait logiquement laisser tous les citoyens se conformer au contenu de son arrêté, le ministre accorde un délai d’une semaine, à compter du 21 mai, à une certaine catégorie d’usagers d’être à jour, mais il dresse une liste de privilégiés, intouchables sous le vocable de personnalités qui peuvent continuer à circuler dans des véhicules à vitres fumées et sans plaque minéralogique.
Ces tchadiens pas comme les autres sont cités parmi les membres du gouvernement ; les présidents des grandes institutions; les commandants des grandes formations; les généraux de l’Armée nationale et de la Police nationale; les gouverneurs; les services spéciaux et clin d’œil aux chefs des missions diplomatiques et représentants des organisations internationales. Ces personnalités sont tenues d’adresser une demande d’autorisation au directeur général de la Police nationale comportant les renseignements demandés. L’arrêté précise que “ces véhicules ne peuvent être utilisés que par les personnalités habilitées”. Mais pourquoi, ces personnalités aussi respectables que leurs qualificatifs l’indiquent doivent se camoufler derrière des vitres fumées? Pourquoi d’autres citoyens qui ont les mêmes droits et les mêmes devoirs qu’elles sont tenus à s’exposer derrière les claires ? Qui dit que de tous ceux-là qui sont exemptés, ne figure aucun malfaiteur, aucun criminel quand parmi des malfrats pris souvent les mains dans le sac, pour ne pas dire le sac dans la main, comme l’a dit quelqu’un, on trouve des chefs de brigade ou des responsables des unités militaires?
Si l’objectif visé par cet arrêté est tant la lutte contre la criminalité à quoi fait face la capitale tchadienne et le Tchad-profond ces derniers temps, pourquoi soustraire de ceux qui doivent se conformer à la règle une catégorie de tchadiens ? En le faisant ainsi, le ministre ouvre la boîte de Pandore. Il aura de la peine, comme dans les précédents contrôles qui ont pour la plupart accouché d’une souris, à réussir cette ultime opération.
Ne creusons pas davantage le fossé des discriminations qui font le lit des injustices. Cela est dangereux pour notre pauvre Tchad qui n’a besoin que de paix et de sécurité pour son développement.
Djéndoroum Mbaïninga