Vivre dans une grande ville comme la capitale N’Djaména nécessite jour et nuit des efforts incommensurables. Les affaires, en général et la vente ambulantoire en particulier font partie de ces efforts à fournir au quotidien pour se tirer d’affaire. Beaucoup de jeunes N’Djaménois s’y lancent, surtout en période de vacance.
Sortant de la maison avec un espoir aussi grand que le monde, les vendeurs ambulants, animés par le désir de gagner toujours plus, effectuent des kilomètres en longueur des journées à travers la ville. Des sourires sporadiques se versent de part et d’autre, prennant en otage les lèvres et illuminent brièvement leur visage lorsqu’ils contractent un deal positif, mince soit-il avec leurs clients. Voilà encore un alibi de plus qui, bien que non visible, augmente leur force de marche. Aussi, certains vacanciers, pendant leur business ambulant, tombent sur des personnes généreuses qui les aident en dehors des recettes qu’elles leur font. C’est le cas de Rosalie, jeune fille de 19 ans qui nous raconte ses exploits : « j’ai commencé la vente ambulante lorsque j’avais 16 ans. C’était très difficile pour moi au début ; mais il m’a fallu seulement deux semaines pour briser la chaine de la complexité. Mon business ne m’a pas empéché d’aider ma mère dans le menage. Il nous permet aussi de payer le loyer. Il y a aussi les gens de bonne foi qui m’aident. », explique-t-elle.
Dans les coins et recoins de la première capitale africaine à chèreté de vie trop élevée, l’on ne cesse de rencontrer les vendeurs ambulants. Les uns vendent les brosses à dent, les pâtes dentifrices, les parfums, les chaussures, …, les autres, des cigarettes, des colas,…, d’autres encore les fruits (mangues, babanes, avocats, etc.), les œufs, les concombres pour ne citer que ceux-là. Dans tous les cas, la vente ambulante devient en été, l’activité la plus exercée par les vacanciers. Pour Djekornom Debonheur, le marché ambulant en période de vacances convient mieux aux élèves qui ont, non seulement pas de soutien mais aussi à ceux qui ont tout simplement l’esprit de se battre. « Je suis élève en classe 5ème en vacances. Comme certains, je me lance habituellement dans la vente ambulante des brosses à dent, des pâtes dentifrices et bien d’autres articles pour épauler mes parents dans l’achat de mes habits et surtout de mes fournitures scolaires pour la rentrée prochaine », affirme-t-il.
L’ambiance qui prévaut dans cette catégorie de business est particulière de par son caractère routinier. On voit et ressent le désir de vivre, du moins modestement à travers cette monotonie routinière que chacun de ces battants met à son profit.
La détermination des jeunes vacanciers est bien pointue et par-là, devient un attribut de leur caractère, peut-être venait-elle de leurs origines modestes. La recherche de l’argent via la vente ambulante est perçue, non seulement comme un courage satisfaisant mais aussi un sacrifice indescriptible. Esrom, un jeune battant nous le témoigne : « le business en temps de vacances est bien pour tout le monde plus particulièrement pour un élève. Je suis dans la vente ambulante des parfums, des chaussures, etc. et cela me permet d’acheter mes choses sans déranger les parents. Au contraire, pendant ces vacances, c’est moi qui leur donne parfois quelques choses pour leur transport. J’arrive aussi à bien économiser pour qu’à un moment, je puisse chercher mes fournitures scolaires ». Voilà un témoignage rendu avec autorité, tenant lieu d’enseignement pour les autres jeunes qui préfèrent bien soulager leurs parents dans certaines tâches.
Le « business » des vendeurs ambulants aide vraiment les parents qui en connaissent l’importance et encouragent sincèrement. Siméon, géniteur d’un vendeur ambulant témoigne : « je suis le père de Narcisse, élève en vacances et vendeur ambulant. Mon fils, âgé de 14 ans ne manque pas de nécessaire à la maison. Son activité est gonflée de risques et je n’étais pas du même avis que lui au départ quand il m’en a parlé. Mais il m’a convaincu en me rassurant que ce n’est pas une tentative de m’exposer, mais juste une voie qu’il a choisie pour m’aider dans l’achat des fournitures scolaires pour la rentrée prochaine. Il me confie même sa petite caisse d’économie. Puisse Dieu protéger ces enfants qui se battent et qui reconnaissent les efforts de leurs parents ». Malgré ses quelques avantages, la vente ambulante contient en elle des conséquences à relever.
Les affaires qui ne vont pas sans risques
Certains vendeurs ambulants, par privation de langage mercatique ou, on ne le sait, par la possession d’une âme prédestinée à la malchance, font souvent face aux clients bourreaux et se retrouvent davantage dans une mésaventure fourbe et tortueuse : c’est dommage de vivre un tel cataclysme ambulant. Menodji Pierrette donne son témoignage : « je vends le manioc cuit, j’ai été un jour interceptée par deux jeunes gaillards qui décident de me faire une recette de 300 f CFA devant leur domicile. Alors je cherchais la monnaie pour régler la différence, l’un d’eux a pris mon sceau de manioc pour aller deposer dans leur concession. A mon retour son ami me dit d’aller chercher ma marchandise qui se trouve finalement dans la concession. Lorsque je viens pour chercher, ils m’ont prise manumilitari pour m’amener dans la chambre et m’ont violée ».
D’un moment à l’autre, ces pauvres marcheurs ou athlètes immodérés se retrouvent épuisés. Leurs lèvres, précédemment inondées de joie deviennent ipso facto sèches et attirent la pitié. Si d’une part les agressions, les viols et l’escroquerie sont les obstacles dont font quotidiennement face ces débrouillards, d’autre part, les accidents réccurents ne sont pas non plus à minimiser. Dans tous les cas, il faut comprendre que ces vendeurs ambulants s’exposent aux risques que ce soit par gré ou par contrainte.Car au-delà des avantages de cette activité, se trouvent les conséquences les plus souvent irréparables.
Toïdé Samson, stagiaire