Les domaines de la littérature et de la musique ont significativement contribué cette année 2020, malgré la pandémie de la Covid-19, à la promotion et à la visibilité de la culture tchadienne à l’intérieur et extérieur du pays. Les hommes et femmes de ces domaines ont su maintenir la flamme allumée, à travers des évènements, projets, manifestations ou des œuvres de qualité.
La palme est accordée, sans hésiter, à notre compatriote Nimrod Bena Djangrang poète, essayiste et romancier vivant en France, qui a décroché le prestigieux “Prix littéraire Apollinaire 2020 de la poésie”, pour son recueil de poèmes intitulé “Petit éloge de la lumière nature”, publié chez Obsidiane cette année 2020. Ce prix, qui est assimilé dans l’espace francophone à celui du Goncourt du roman, récompense chaque année l’originalité et la modernité d’un recueil de poèmes. Nimrod est auteur de plusieurs œuvres de grandes qualités dans le domaine de la Poésie, Romans/récits et Essai.
Sur le plan national, plusieurs activités littéraires ont permis de révéler, au grand public, des plumes confirmées et en devenir, qui enrichissent la littérature tchadienne d’expression écrite française. Il s’agit notamment du festival international “Le souffle de l’harmattan”, qui a distingué le 12 décembre, à l’issue de sa 7ème édition, quatre écrivains et auteurs, dont trois figures emblématiques de la littérature tchadienne et une dame, pour leur engagement, soit pour avoir sorti de son hibernation la chose littéraire, soit pour avoir eu à traiter d’une pertinente thématique qui rend en écho le vœu cher des Tchadiens de vivre ensemble. Il s’agit du défunt Hourmadji Moussa Doumgor décédé le 5 juillet 2020 (Le Grand prix le Souffle de l’harmattan), Marie-Christine Koundja (le prix le souffle de l’harmattan de la Meilleure romancière tchadienne), Pr Avocksouma Djona Atchénemou (le Prix le souffle de l’harmattan du Meilleur roman 2020) et Nocky Djédanoum (le Prix le souffle de l’harmattan du Promoteur culturel 2020).
Le 30 novembre dernier, le ministère en charge de la culture a décerné trois prix à la clôture du mois du livre et de la lecture. Le Grand prix littéraire national 2020 (La Plume d’or) est revenu au docteur Ali Abderamane Haggar, le Prix Jeune talent 2020 à Renaud Dingamnael et le Prix de la Plume féminine 2020 à Me Clarisse Rémadji Nomaye. En juillet dernier, l’association des écrivains et auteurs du Tchad (Aseat) a lancé un concours littéraire sur le thème “Coronavirus” dans deux genres, la nouvelle et la poésie. Les résultats sont attendus dans les jours à venir, dit-on. Un autre concours des nouvelles de lutte contre Covid-19 a été lancé du 18 avril au 3 mai 2020, par les Éditions Salon des belles lettres, avec pour thème “Remuer la plume dans le virus”. 16 participants sur les 25 (tous des jeunes plumes) ont été primés en juin et leurs nouvelles compilées dans un recueil.
La musique n’est pas du reste
Sur le plan musical, l’on retiendra que le projet Au nom de l’art du célèbre musicien Maoundoé Célestin est finalement un véritable programme de développement artistique et culturel, adossé à l’éducation. Sa vision prospective allie l’esthétique à l’économique. Il s’exécute en plusieurs étapes avec différentes composantes à l’intérieur et est lancé depuis le mois d’octobre autour des enfants de 7 à 15 ans, et maintenant avec les potières de Gaoui pour leur alphabétisation et la transformation de la poterie à la céramique, afin d’aller vers leur autonomisation. Autre fait marquant est la sélection du groupe musical Décibel sur la liste des finalistes des Découvertes Rfi 2020. Les artistes Mélodji et Abdoulaye Nderguet alias “Djabar” séjournent en France à l’initiative de l’Institut français du Tchad (Ift) pour des résidences de création et enregistrement d’album. Abdoulaye Nderguet, dont on compare volontiers le timbre vocal à celui de Caetano Veloso, a choisi de travailler sur un projet d’album titré “L’âme du blues”. Enregistré au Triton, une scène nationale de musique actuelle très jazzy, l’album qui compte une douzaine de titres est un concept qui fait corps avec l’artiste. Il s’inscrit dans le métissage des musiques du monde, ouvert davantage sur le patrimoine culturel tchadien. Le groupe Bex’Tet, composé du trio jazz d’Emmanuel Bex, avec lequel il travaille, l’installe à la croisée de deux cultures, qui mettent au cœur de la création musicale, la liberté et le plaisir d’être ensemble, de partager des émotions et certaines valeurs, à travers des énergies tirées des racines mutuelles. L’ancien chanteur leader du mythique groupe tchadien Tibesti est en ce moment au cœur d’une série d’activités dans l’hexagone. Un concert en octobre avec le groupe Bex’Tet au théâtre Gérard Philippe de Saint-Denis, suivi d’un autre en livestream le 19 décembre dans le cadre du festival Africolor, pour la réouverture du mythique club de Sunset-Sunside. Le 12 décembre, il a fait une sortie remarquée sur TV5 Monde, qui a été beaucoup suivie. Deux jours après, un titre de l’album est passé sur l’émission Couleurs tropicales de Rfi, suivi le 17 décembre de sa participation à l’émission “Open Jazz” dans France musique. Abdoulaye sera le 24 décembre prochain l’invité de l’émission (26 mn) Afronigth sur Télé sud et dans le bouquet Canal+Afrique. Le 15 janvier 2021, Canal+Afrique le reçoit à nouveau dans l’émission “Bonjour santé”. Djabar fait également partie de l’Agenda Fantôme (Covid) sur France musique. L’album est attendu pour le premier trimestre 2021. Djabar sera en concert d’ici la fin de l’année à l’Ift. Le rappeur Sultan, qu’on ne présente plus, a initié un projet autour d’un concept d’Opéra-Rap titré “Sur les empreintes des Sao”. C’est la première fois qu’une création artistique tchadienne est pensée, initiée et proposée autour d’un thème fédérateur qui symbolise la fierté, l’unité et la solidarité. La démarche, qui sous-tend cette création, est de proposer un spectacle professionnel de grande qualité qui sort de l’ordinaire des créations traditionnelles clés en main, et d’impulser une nouvelle vision à la scène artistique et culturelle tchadienne. En choisissant de remonter le cours lointain de l’histoire des Sao (16ème siècle), le projet installe au cœur du spectacle un peuple qui appartient à trois pays (Tchad, Cameroun et Nigeria) transfrontaliers du Lac Tchad et confrontés à plusieurs défis identiques. L’Institut français du Tchad s’est engagé comme premier partenaire de mise en œuvre. La résidence de création est prévue en février et mars 2021, avec le spectacle en mai 2021. Des artistes musiciens 2020 à suivre !
Mbaïnodjiel Neldé Calvin alias Djigri parterre a réussi la prouesse d’imposer l’humour tchadien sur la scène africaine, en devenant membre du Parlement du rire initié par le célèbre chroniqueur de Rfi Mamane. Invité à Abidjan en septembre dernier, il a présenté deux spectacles (la télé et la mode Slim) pour le bonheur du public ivoirien, lesquels continuent de tourner en boucle sur les chaînes africaines de télévision.
Roy Moussa
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