la Commission nationale des droits de l’homme (Cndh), a publié son rapport d’enquête (30 pages), sur les mutilations génitales féminines, la traite et l’enlèvement des personnes contre rançons, dans les provinces du Mandoul et du Mayo-kebbi ouest.
Un rapport structuré en six parties, qui présente le Tchad dans son contexte général, les deux provinces incriminées, une analyse situationnelle par cas, situe les niveaux de responsabilités et propose des recommandations aux gouvernement, partenaires techniques et financiers (PTF), les organisations de la société civile (Osc) et autres structures engagées dans la lutte pour l’éradication de ces phénomènes, et aux différentes communautés. Il ressort de la conclusion du rapport que «(…) l’enquête a permis à la mission de confirmer l’existence de ces phénomènes, qui portent atteintes à l’intégrité physiques des personnes et appauvris les populations. Ces actes sont contraires aux engagements pris par le gouvernement de la République du Tchad. Par conséquent, il est nécessaire de prendre des mesures préventives, protectrices et répressives pour les combattre, en mettant en place un programme de développement des populations victimes (…)».
Une situation qui a amené la Cndh à s’engager à veiller à l’identification et à la poursuite des pratiquants de ces phénomènes, ainsi qu’à assister juridiquement et judiciairement les victimes. Les recommandations émises traduisent les grandes préoccupations de l’institution. Notamment au Gouvernement de: restaurer l’autorité de l’Etat dans les provinces concernées par les phénomènes ; poursuivre et juger les trafiquants présumés ; renforcer la sécurité des magistrats en charge de traitement de ces dossiers pour qu’ils remplissent leurs obligations ; renforcer les capacités des agents de la chaine pénale sur les questions de procédures et les thématiques concernées ; assurer la prise en charge sécuritaire, psychosociale et la réinsertion économique des victimes ; renforcer la coopération bilatérale entre le Cameroun et le Tchad, en vue de sécuriser les populations des zones frontalières ; poursuivre les agents de l’Etat impliqués dans les questions de traite de personnes et de mutilations génitales féminines et encourager les Osc et les média dans leurs activités d’information, d’éducation et de formation. À l’endroit des partenaires techniques et financiers, d’appuyer les efforts du gouvernement dans la lutte contre les violations des droits de l’homme et soutenir les activités de la Cndh et les Osc dans la prévention et la lutte contre ces phénomènes. Aux organisations de la société civile et autres structures de lutte, il est recommandé: de créer une synergie d’actions pour la lutte contre les phénomènes de la traite et les mutilations génitales féminines ; d’intensifier les actions de sensibilisation et d’informations des communautés sur les méfaits de ces pratiques ; impliquer les chefs traditionnels, coutumiers et religieux dans la lutte contre ces phénomènes et mettre en place un mécanisme d’alerte et ou redynamiser les comités de veille et les encadrer. Aux chefs coutumiers, il est aussi recommander de contribuer efficacement en collaborant avec les autorités administratives et les Osc pour la prévention et la lutte contre les pratiques des mutilations génitales féminines et la traite.
Les droits humains bafoués
Selon les statistiques publiées dans le rapport, en ce qui concerne les mutilations génitales féminines, durant les périodes de 2018 à fin 2020 (données collectées par l’Ared), la situation est la suivante: 11487 filles et femmes dont l’âge varie entre 8 et 35 ans sont excisées dans les 15 cantons sur les 33 que compte la province du Mandoul. Dont 5 cas de décès enregistrés, 21 cas d’hémorragies, 48 femmes en grossesse, 36 femmes allaitantes et 17 cas d’avortement. Pour ce qui est de la traite et enlèvement contre rançons, pour les périodes allant de 2015 à 2020 dans le Mayo-kebbi ouest, le tableau est le suivant : pour les localités de Pala (17 personnes enlevées et 3 tuées), Lamé (40 enlevées) et Gagal (51 enlevées, 1 tuée et 176 déplacées) le montant des rançons payées s’élève à 100.000.000 FCFA. A Léré (21 enlevées et 7 tuées), Lagon (5 enlevées) et Binder (45 enlevées et 350 déplacées), le montant s’élève à 52.500.000 FCFA. Soit 179 personnes enlevées, 11 tuées et 531 déplacées pour un montant de 152.500.000 FCFA. le rapport mentionne qu’en plus de ces montants payés aux ravisseurs, les parents des victimes payent aussi les frais d’interventions des forces de sécurité qui s’élèvent à 4.100.000 FCFA
Roy Moussa