Le cinéma appelé aussi le 7ème art, a du mal à émerger au Tchad alors que le pays compte des cinéastes et réalisateurs de renom, avec des œuvres de qualité reconnues.
Si grâce à Hollywood, Nollywood et Bollywood les Etats-Unis, l’Inde ou le Nigeria voisin brassent annuellement des milliards avec la production des œuvres cinématographiques, le Tchad jusqu’à nos jours est un parfait contre exemple et très loin du compte. Un pays qui ne songe pas à structurer ce secteur rentable, capable de booster le tourisme et partant l’économie.
L’absence des textes règlementant le secteur du cinéma au Tchad en est une illustration. “Chez nous, le cinéma n’est pas structuré. Il n’y a pas une direction du cinéma, ni un centre national de cinématographie. Rien n’est fait au niveau du ministère”, renseigne Masbeye Renaud, cinéaste de formation et responsable de la maison de production “Saï production”. Renaud ajoute que “du point de vue administratif, c’est un autre problème. Tu veux tourner un film, on t’envoie au ministère de Communication où tu te retrouves avec des gens qui ne comprennent pas ce que tu fais, mais connaissent simplement faire des reportages. Cela fait partie des difficultés qu’on rencontre à chaque fois du côté administratif”. Le promoteur de “Saï production” trouve aussi anormal que le ministère en charge de la culture ne finance pas les réalisations qui relèvent aussi du domaine de l’art. De fait, quand un film est réalisé, il reflète l’image d’un pays. “Ce ne sont pas toutes les œuvres que nous vendons. Certaines sont des œuvres créatives qu’on envoie juste dans des festivals”, ajoute-t-il.
Le cinéma tchadien a de la valeur. “Avec Mahamat Saleh Haroun, Issa Serge Coelo et l’acteur Youssouf Djaoro qui ont sillonné des festivals et remporté des prix, les gens ont vu la valeur du cinéma tchadien et sont étonnés que des beaux films se font aussi au Tchad. Les aînés l’ont fait avec ce qu’ils ont. Nous savons que le cinéma au Tchad a de l’avenir”, espère Renaud. Il confie que “Saï production” a réalisé trois longs métrages, dont deux (Ronel et le Fantasme du DG) en coproduction avec la télévision nationale du Tchad qui les diffuse. Mais il est aussi difficile de comprendre pourquoi les films tchadiens qui ne sont pas produits en collaboration avec la Télétchad, ne sont pas régulièrement diffusés. “On est artiste mais pas mendiant et tout ce qu’on demande, c’est que le ministère organise les choses afin qu’on ait une direction de cinéma, un centre national de cinématographie, et qu’on reconnaisse l’artiste en tant que tel”, plaide-t-il.
Des initiatives existent mais …
Des initiatives ne manquent pas. Seulement, rien n’avance. La dernière en date est l’atelier de réflexion organisé par la Fédération panafricaine du cinéma (Fepaci), à travers le secrétariat régional Afrique centrale basé à N’Djaména, en marge de la 2ème édition (octobre 2019) du festival tchadien de courts métrages (Fetcoum). La réflexion a porté sur l’amélioration de l’environnement juridique, réglementaire et professionnel du cinéma et des cinéastes ; la mise en place de mécanismes appropriés de financement ; le développement de l’offre de formation et le renforcement de la coopération culturelle avec d’autres pays. Plusieurs acteurs et intervenants du secteur du cinéma au Tchad y ont pris part aux côtés des experts internationaux.
Des recommandations ont été faites au gouvernement, parmi lesquelles l’accompagnement des acteurs et intervenants du secteur du cinéma à organiser des assises nationales en vue de la structuration des filières ; recenser et définir les métiers du cinéma en collaboration avec les acteurs et intervenants du secteur, comme préalable à l’élaboration des textes spécifiques (lois, décrets, arrêtés, etc.) au secteur du cinéma ; formaliser la collaboration avec la Fepaci à travers le secrétariat régional Afrique centrale basé à N’Djaména pour renforcer les capacités institutionnelles des organisations du secteur du cinéma, vers une meilleure professionnalisation ; mettre en place conjointement un comité de suivi de la mise en œuvre des recommandations. Une feuille de route a été remise au ministère en charge de la culture. Depuis lors, c’est le silence radio, apprécie le secrétaire général de la Fepaci, Cyrille Danina. “Jusque-là le ministère n’a rien fait et il n’y a pas une avancée souhaitée. On espère relancer avec l’organisation du forum sur le statut des artistes en cours, dit-on. D’ici là on va produire un document à rendre public”, projette-t-il.
Modeh Boy Trésor &
Roy Moussa