Le Fonds monétaire international (Fmi) est à sa première visite mondiale, du 6 au 9 octobre depuis l’avènement du Covid-19 et c’est le Tchad qui est l’élu. D’une part, c’est un honneur mais d’autre part, cette visite découle de la situation difficile à laquelle est confrontée l’économie tchadienne.
“La dette du Tchad est insoutenable, par conséquent sa restructuration est plus que jamais nécessaire”, conclut la délégation du Fmi à l’issue de sa visite.
Pourtant, le chef de mission du Fonds monétaire international (Fmi) au Tchad, Edward Gemayel, juge la dette du Tchad acceptable. Elle se chiffre à un montant global d’environ 3 milliards de dollars, soit 25 à 30% du Produit intérieur brut (Pib) du Tchad.
Problème, les services de la dette absorbent une énorme partie des revenus du pays. Les dettes deviennent de facto insoutenables. Le Tchad éprouve de la peine à assurer ses services de base tout en réglant ses dettes d’autant plus que le marché économique est fluctuant, bouleversé par plusieurs évènements.
“La situation économique et financière du Tchad continue à se détériorer sous l’effet conjugué des chocs subis par le pays: pandémie de Covid-19, baisse des cours du pétrole, changement climatique et attaques terroristes”, a noté dans son communiqué final, Abebe Aemro Selassie, directeur du département Afrique du Fmi, qui a conduit la mission au Tchad. Suite à ces chocs, le Pib du Tchad s’est contracté d’environ 1% et sa croissance économique est de moins 1% en 2021, même si ces chiffres sont jugés en hausse par rapport aux prévisions. Une situation qui risque d’avoir de lourdes conséquences sociales. “Des récents entretiens ont confirmé les inquiétudes de plus en plus vives que suscitent les difficultés de financement auxquelles le Tchad est confronté, et qui ont contraint les pouvoirs publics à réduire les dépenses sociales et de développement essentielles. Si ces dépenses ne sont pas rétablies, rapidement à leur niveau antérieur, on peut craindre de graves conséquences en matière social et pour la sécurité du pays”, s’inquiète-t-on au Fmi.
La dette étant jugée non viable, le Conseil d’administration du Fmi exige son traitement avant d’approuver des financements à l’appui du Tchad. “Programme soigneusement calibré de rééquilibrage des finances du Tchad”. Sur ce plan, on note déjà une avancée. Le 16 juin, les créanciers membres du G20 ont accepté le traitement de la dette au-delà de l’Initiative de suspension du service de la dette (Issd) en faveur des pays les plus pauvres dont le Tchad. C’est une initiative qui vise à alléger temporairement les contraintes de financement des pays pauvres pour libérer de l’argent pour qu’ils utilisent pour atténuer l’impact économique de la Covid-19. C’est-à-dire qu’ils acceptent de négocier les conditions de restructuration de la dette. L’inconnu demeure du côté des créanciers privés du Tchad. Leur accord est indispensable pour permettre au Fmi de procéder au redressement économique du Tchad. Sur ce point, le ministre des Finances et du budget, Tahir Hamid Nguilin est optimiste. Il espère qu’un accord pour la restructuration de la dette avec les créanciers privés sera trouvé d’ici novembre 2021.
Des questions lui ont été également adressées sur les dépenses militaires en ce moment où le Fmi lance l’alerte rouge sur les investissements sociaux. “Les dépenses militaires représentent 25 à 30% de notre budget. Ce qui est acceptable pour un pays qui fait face à des problèmes de sécurité comme le nôtre”, a rétorqué le ministre des Finances. Au vu de ces situations économiques, le Tchad pourra-t-il financer l’organisation du dialogue ou la transition et respecter les engagements sociaux, notamment le pacte social conclu avec les organisations syndicales le 4 octobre 2021? “Nous travaillons pour obtenir le financement nécessaire. Sinon, sur le plan national, nos régies financières ont toujours produit les résultats attendus. Je crois que la situation sociale n’est pas mal. Elle est mieux par rapport à ce que nous avons vécu en 2018 et 2019”, répond Tahir Hamid Nguilin.
Pendant que le Tchad se plaint de la fluctuation des revenus réguliers, Esso ferme son site de production de pétrole de Komé suite au conflit avec ses employés par rapport à la vente de ses actions à un nouvel acquéreur. Un élément sur lequel il faudra compter vu la part importante qu’occupe les revenus pétroliers dans le budget du Tchad.
Lanka Daba Armel