A l’issue de leur assemblée générale (Ag), le 21 juin dernier au palais de justice de N’Djaména, les magistrats boudent leur indépendance consacrée par le projet de constitution en cours d’examen au Conseil national de transition (Cnt).
“Tout ce qui se fait pour nous et sans nous, est contre nous”, déclare Moussa Wade Djibrine, président du Syndicat des magistrats du Tchad (Smt), au cours d’un point de presse conjoint. Si les magistrats disent avoir concédé volontiers le retrait du président de la République du Csm (Conseil supérieur de la magistrature), ils ne comprennent pas qu’il demeure garant de l’exécution des décisions de justice (article 52, alinéa du projet). “D’ailleurs, le titre de président du Csm a une base constitutionnelle. Tout autant que le président de la République soit garant des institutions de la République, il l’est pour celui de la justice et de l’exécution de ses décisions. A ce titre, il ne lui appartient pas de se désister unilatéralement. La question doit absolument requérir la technicité et l’assentiment des magistrats”, précise Moussa Wade Djibrine, qui fustige la composition du futur Csm. Aux termes du projet de constitution, le Csm sera composé d’enseignants d’universités et autres membres de la cour des comptes, qui ne sont pas des magistrats à la base. Et le président sera nommé par le président de la République, au lieu d’être élu par ses pairs, qui doivent être des magistrats de grade hors hiérarchie.
“Quoique la réforme du Csm soit l’émanation de l’ardent désir des magistrats professionnels, qui réclament son institutionnalisation depuis des lustres, sa forme actuelle en projet soulève effectivement question dans ses aspects formels qu’organisationnel, par devant relevés”, appuie Taoka Bruno, président du Syndicat autonome des magistrats du Tchad (Syamat). “Le président de la République n’a pas choisi d’être président du Csm pour choisir de s’en mettre en congé. S’il pense n’avoir plus aucun rôle de premier plan à y jouer, autant le faire dans les règles de l’art”, enfonce Taoka Bruno, qui conclut : “Tant qu’on ne nous aura pas associés à cette réforme du Csm, qui nous concerne au premier chef, nous serons en cessation de travail”, annonce-t-il une grève immédiate, décidée en cette Ag particulièrement mobilisatrice. Il faut noter que le projet controversé passe en plénière le lundi, 26 juin prochain, à l’hémicycle où le Syndicat des magistrats du Tchad affirme avoir introduit une note demandant la clairvoyance et la vigilance des conseillers nationaux, après la saisine échouée du président de transition, Mahamat Idriss Déby sur la question.
Thomas Reoukoubou