Sabarna ne décolère pas

La plateforme des diplômés en instance d’intégration dénommée “Sabarna” compte aller jusqu’au bout de sa revendication pour l’intégration à la Fonction publique de ses membres.

Constituée des lauréats des sciences de l’éducation, une fraction des diplômés des écoles professionnelles et les lauréats des universités du Tchad, la plateforme Sabarna qui compte plus de 800 membres composés des lauréats de 2007 à 2024, a fait encore parler d’elle le 17 juillet 2024 dernier par des arrestations de ses membres. Ceux-ci étaient allés organiser un sit-in devant la Primature pour se faire entendre. Créée 2014, cette plateforme qui a été reçue en 2021 par le défunt président Idriss Déby Itno avec des promesses de décréter les uns et d’intégrer les autres, s’est vue flouer. Les promesses du feu Maréchal Déby Itno ont volé avec son décès en éclats. Même si après, certains parmi eux ont été intégrés avec des conditions pendant la transition, l’actuel groupe multiplie des actions. “Durant la transition du gouvernement de Pahimi Padacket Albert, un nombre très limité des diplômés ont été intégrés, et pour nous autres, nous devrons attendre. Nous avons accepté parce que la transition est là pour gérer les affaires courantes, donc ne peut pas prendre une décision pour une intégration ou des actes officiels, et nous avons accepté d’attendre les élections pour continuer à mener des démarches auprès des autorités pour notre tour. Nous avons été même reçus par le directeur général adjoint de la police nationale qui nous a expliqué la sensibilité de cette période couplée des manifestations politiques donc de sursoir à nos actions”, explique Yussuf Sumaye Yacub qui a pris la tête de la plateforme en 2022 comme président. Selon lui, si pendant cette période, aucune action n’a été menée, c’était pour respecter la parole donnée. Mais après les élections, les démarches ont été reprises auprès des autorités qui sont peu flexibles aux questions et ne veulent pas tenir leurs promesses lors des conversations antérieures. “C’est cette attitude qui nous a amené à organiser une marche pacifique ; un sit-in devant le ministère de la Fonction publique ; devant l’ambassade des États-Unis pour demander de l’asile, comme le pays ne veut pas de nous et là, la police est repartie encore nous disperser. Nous avons reçu des informations que le président de la République avait officiellement donné l’aval de nous intégrer, mais jusqu’aujourd’hui, le ministre de la Fonction publique n’a pas encore reçu cette ordonnance. Donc, le blocus se trouve au niveau de la Primature. C’est pourquoi, on est parti revendiquer en organisant un sit-in et pendant que nous avons été reçus par le cabinet du Premier ministre, on nous informe que nos amis qui nous attendaient à l’extérieur ont été appréhendés et nous de même à notre sortie”, explique-t-il. Dispersés dans 5 arrondissements, ils seront relâchés, certains le soir et d’autres, tard dans la nuit. Pour le président de la plateforme Sabarna, leur lutte pour l’intégration à la Fonction publique n’est pas guidée par les hommes politiques comme beaucoup le pensent, mais pour défendre ce qui leur revient de droit et cela relève du devoir du gouvernement qui a investi dans leurs formations. Selon lui, ce n’est pas tout le monde qui sera intégré, mais il faut que le gouvernement les écoute à travers un dialogue constructif afin de leur éviter d’être toujours dans la rue en train de manifester. Pour lui, par exemple, si le gouvernement accorde aux moins 100 places aux membres de Sabarna pour l’intégration et que si la base accepte par rapport aux critères déjà établis, ils vont accepter et continuer dans la même lancée pour le reste, parce que l’intégration est un processus. Yussuf Sumaye Yacub estime que dans la pratique actuelle, les gens s’intègrent par des voies de consanguinité ; il y a ceux qui déboursent des centaines de mille pour se faire intégrer, mais eux n’ont pas tous ce privilège. C’est pourquoi, ils se sacrifient par cette lutte et garderons cet élan.

 

Pourquoi ne pas entreprendre ?

À la question savoir pourquoi ne pas entreprendre au lieu d’attendre l’intégration à la Fonction publique, Yussuf Sumaye Yacub a précisé que des projets ont été déposés par plusieurs membres de la plateforme, y compris lui-même, mais aucun d’eux n’a été retenu pour un financement. Selon lui, son projet d’élevage de porcs a été retenu, mais après l’avoir présenté pour son appréciation avec une garantie de financement, il s’est rendu compte après que le projet a été financé et exploité par une tierce personne. S’il avait reçu ce financement, il ne serait pas dans la plateforme en train de revendiquer d’être intégré à la Fonction publique. “Si aujourd’hui, nous recevons un financement pour chaque membre de Sabarna pour entreprendre, nous allons accepter. L’essentiel est que nous avons un soubassement pour nous permettre de maintenir nos familles. Mais nous ne voulons pas entreprendre avec nos propres moyens, nous voulons à ce que l’État s’assume, que ça soit par le biais de ces organismes ou organisations, il doit assumer ses responsabilités. Il faut qu’il se rende compte que comme il a formé, il peut aussi employer ces gens. L’Office national pour la promotion de l’emploi (Onape) ou le Fonds national d’appui à la formation professionnelle (Fonap) qui sont les partenaires de l’État nous appellent pour nous financer, je ne trouve pas pourquoi les membres de Sabarna ne seront pas d’accord. Je ne trouve pas le motif, donc comme vous avez vu l’intitulé de notre plateforme, nous voulons juste un emploi, mais pas de n’importe quoi, ce qui va garantir notre dignité”, conclut-il.

Modeh Boy Trésor