Les principaux axes qui relient les quartiers de N’Djaména, comme l’Avenues Ngarta Tombalbaye, Charles de Gaulle, Mobutu, etc caractérisée en temps normal par une densité de circulation, ne le sont plus, depuis le 1er janvier 2021. Les taxis et minibus qui desservent les quartiers reculés sont obligés de garer dès le premier jour du nouvel an. C’est la conséquence du décret 2585, du 31 janvier 2020, portant confinement de la ville de N’Djaména qui, en plus de la fermeture des frontières aériennes et terrestres, interdit les transports urbains et interurbains, à cause de la recrudescence du coronavirus, selon les autorités.
Estimée à plus de deux millions, la population n’djaménoise subit depuis cette date les conséquences drastiques d’une interdiction de circuler par bus ou taxis, qui sont les moyens de transport en communs, à la bourse de la majorité des ménages n’djaménois. Les mototaxis sont les seuls moyens de transport qui s’offrent aux citoyens qui ne disposent pas d’engins. Du coup, les conducteurs des motos, communément appelés “clandomen”, augmentent le prix de leurs prestations, sans tenir compte de la distance à parcourir. Ainsi, Mariam a été obligée de suspendre ses activités après avoir difficilement supporté les dépenses de deux jours de transport en mototaxi. “Je me suis rendue compte que je ne peux plus continuer à dépenser presque 3000 francs CFA par jour de transport aller-retour, alors que je dépensais tout au plus 600 francs pour mon transport Boutalbagar-marché à mil pour vendre les légumes. C’est mieux de rester à la maison avec mes enfants que de dépenser une telle somme sur le clando”, déplore-t-elle.
A cause du transport, le prix de tout ce qui se vend en cette période de restriction a grimpé. Aller en moto clando revient très cher à la population pauvre. Une courte distance coûte 500 francs ou plus. C’est à prendre ou à laisser, chantent les clandomen. Les clients qui, parfois, n’ont pas de choix, mais, sont tenus d’être chez eux avant l’heure du couvre-feu en sont obligés. Ainsi, beaucoup de personnes qui n’en ont pas les moyens, se livrent au sport à pieds, contre leur gré, pour faire face à la situation. Du coup, les frustrations sont patentes. “Nos autorités ne soucient pas du bien-être de leur population. Une ville comme N’Djaména ne peut pas fonctionner sans transport en commun. Même si la maladie existe toujours, ce n’est pas une raison d’interdire le transport en commun. C’est une activité qui nourrit beaucoup de personnes et c’est grâce aux transports en commun que, nous les pauvres, nous nous déplaçons”, s’écrie Souleyman, boucher.
“Il faut que les autorités comprennent qu’elles ont échoué dans la gestion du pays, car il y a plus de pauvres que de riches. Ce qui fait que les décisions qu’elles prennent sont impopulaires. Imaginez-vous, je suis conducteur de taxi, c’est de ça que je nourris ma famille. Mais, je suis dans la deuxième semaine sans activité. Comment pourrai-je m’occuper de ma petite famille?”, s’emporte Saleh Ibrahim, taximan sur la route Dembé-marché central.
Le lendemain de l’entrée en vigueur du décret interdisant la circulation des bus et taxis, le Syndicat des transporteurs a réagi et estime par la suite que son cri de cœur allait être écouté par les autorités. Mais c’est peine perdue, car la mesure est renouvelée jusqu’au 14 janvier.
Nadjidoumdé D. Florent