C’est un ancien cultivateur malien qui s’est reconverti en teinturier. Agé de 39 ans, Moussa Coulibaly trouve son épanouissement dans sa nouvelle profession.
A l’ombre d’un arbre situé dans le quartier Ardep-Djoumal, Moussa, en tenue de travail, gants rouges, pantalon jean’s, et t-shirt vert, mélange une série de poudre dans une bassine sur un feu, sous le regard de ses apprenants. L’ensemble de ces poudres de différentes couleurs que le jeune teinturier panache dans une eau bouillante pour donner une couleur de son choix, couleur unique ou bigarrée à un vêtement est appelé “gala”, en langue bambara. En fonction de la demande du client, Moussa change la couleur initiale du tissu ou en rajoute une autre. Il trempe intégralement le tissu dans le mélange pendant une trentaine de minutes ou juste une partie et c’est un habit complètement différent de l’original qui en sort. Le temps nécessaire à la transformation écoulé, Moussa et son équipe étalent les habits à sécher. Cet exercice qui consiste à sillonner entre le feu, la fumée et le soleil, Moussa le fait plusieurs fois par jour.
Né dans la localité de Bamandiougou au Mali, Moussa s’est installé dans la capitale tchadienne depuis 14 ans où il vit de son métier de teinturier. Il fait dans la teinture des habits communément appelés “chadats”, les vestes, voire les tenues militaires.
Ce métier, il l’a appris aux côtés de son grand-frère. “Je suis allé au Benin à la recherche de mon frère qui vivait de ce métier. Il m’a initié à la teinture. Ainsi, on a travaillé pendant quatre mois”, explique-t-il. En exerçant au Benin, Moussa Coulibaly a croisé le chemin d’une femme. Cette dernière l’a convaincu de venir à N’Djaména s’installer afin de développer son business. “Elle m’a signifié que les tchadiens aimaient beaucoup les “chadats” et que je pouvais m’en sortir mieux ici. Effectivement arrivé ici, j’ai pu réaliser beaucoup de mes projets grâce ce métier”, confie l’artisan.
Parmi tous les pays de l’Afrique centrale, c’est ici au Tchad qu’il se sent à l’aise pour le bon fonctionnement de son métier, même si quelques difficultés avaient jalonné ses débuts. “Les gens ne comprenaient pas trop ce que je faisais. Ils se demandaient si les produits que j’utilisais ne nuisaient pas à ma santé. J’ai galéré avant de trouver un endroit pour mon travail, mais avec le temps, tout est entré dans l’ordre”, se rappelle-t-il.
En plus de son métier de teinturier, Moussa a ouvert également des établissements de pressing dans la ville. “Mes pressings sont assez spéciaux. Quand les clients viennent avec leurs habits et que je vois que c’est un peu vieux et délavé je leurs propose de changer la couleur”, explique-t-il.
Polygame et père de sept enfants, Moussa transmet cette connaissance à plusieurs jeunes Maliens et Tchadiens qui aspirent à devenir comme lui. “Les Tchadiens apprécient vraiment les résultats de mon travail. Mais en ce qui concerne la formation, ils n’ont pas le courage d’apprendre pendant une longue durée. Plusieurs ont abandonné au bout d’un mois”, observe-t-il. A propos, la maîtrise de la teinture nécessite neuf à onze mois d’apprentissage.
Ouvrir un centre de formation fait partie de ses plus grands projets et il se donne les moyens afin de le réaliser dans les années à venir. Moussa compte rester à N’Djaména jusqu’à sa retraite. Il dit avoir formé une soixantaine de personnes en quatorze ans. C’est dans le but d’aider sa famille que Moussa a décidé d’aller en aventure, il est à la tête d’une grande famille qui compte sur lui. “Je travaille beaucoup et je me donne les moyens d’atteindre mes rêves”, conclut-il.
Boré Wassa, stagiaire