Le 3 novembre dernier, des militaires armés, à bord de trois véhicules, ont investi la Paroisse Saint Isidore Bakanja de Walia-Goré dans le 9ème arrondissement, sans aucun respect du lieu sacré et des personnes qui s’y trouvent. Des actes barbares commis par ceux qui sont censés protéger les citoyens et leurs biens, ont provoqué l’indignation de la communauté catholique du Tchad et de la plupart des Tchadiens.
Dans sa lettre adressée à toutes les communautés et institutions de “l’Eglise-famille de Dieu à N’Djaména” le 5 novembre dernier, l’Archevêque métropolitain de N’Djaména, Mgr Djitangar Goetbé Edmond dit suivre de près cette affaire qui n’est pas un fait isolé et qui “confirme le mépris des personnes et des lieux de culte par ceux qui sont censés les protéger”. Mgr relève plusieurs actes commis par les forces de l’ordre. Le 6 février 2018, lors des manifestations, des gaz lacrymogènes ont été délibérément tirés dans la cour de la Paroisse Saint Mathias Mulumba blessant des fidèles qui sortaient de la messe matinale; le 29 mars 2020, les forces de l’ordre du Groupement mobile d’intervention de la police ont empêché un prête d’accéder à la Paroisse du Sacré-Cœur de Chagoua pour célébrer l’Eucharistie dominicale à cause du confinement. Le 27 avril dernier, 7 véhicules Toyota des militaires de l’armée tchadienne ont fait irruption dans la Paroisse du Sacré-Cœur et prétendre occuper les lieux pour se reposer; le même jour, un autre groupe des forces de répression des manifestants ont jeté de nouveau des grenades lacrymogènes. Au regard de toutes ces violations dont est victime la communauté catholique, l’Archevêque a fait une mise au point. Pour lui, le manque de respect d’un lieu de culte fréquenté et avec tous les signes de son caractère sacré constitue une violation du premier article de la constitution qui déclare que le Tchad est un pays laïc. Et en violant délibérément ces lieux sacrés, Djitangar Edmond estime que ces militaires se mettent au-dessus de la loi ou dans une position de hors-la-loi. Quel que soit le motif qu’il continue à rechercher, l’Archevêque ne tolère pas le fait que ces militaires aient injurié le Curé de la paroisse et porté leur main sur lui pendant qu’il est en plein exercice de sa responsabilité. L’Archevêque de N’Djaména souligne que le traitement actuel du site de la basilique par les marchands de sable et de briques ainsi que la démission de la police municipale face à la situation décourage toute organisation religieuse sur ce site. Aussi, la tente de la Cathédrale où tout un côté est transformé en espace de vente de fournitures militaires au vu et au su de tous, malgré les plaintes des fidèles auprès des autorités municipales, constitue également une atteinte à la communauté catholique. D’un ton assez critique, Mgr Djitangar Goetbé Edmond dénonce ces violations qui compromettent le vivre-ensemble dans un pays laïc. “Nous dénonçons certaines attitudes et comportements de mépris que certains compatriotes adoptent vis-à-vis de la religion des autres. C’est une forme d’intolérance qui ne doit pas avoir place dans une société plurielle comme la nôtre. Ceux qui se conduisent ainsi se mettent en guerre contre Dieu car Dieu ne méprise aucune prière faite de bon cœur et avec une conscience droite, quelle que soit la confession religieuse du croyant”.
L’Archevêque demande aux fidèles catholiques de prier pour la conversion de ceux qui n’ont pas de respect pour les choses sacrées par ignorance ou par mépris, afin qu’ils reviennent à la raison pour faire respecter le caractère sacré des lieux de culte. Il les exhortent également de rester vigilants pour dénoncer toute conduite et activités suspectes à tendance de nuire au caractère sacré des lieux de culte.
Aux Curés, le Pasteur demande de prier pour le pardon du Seigneur pour tous ceux et celles qui font du mal à l’Eglise; de renforcer la sécurité des Tabernacles dans les chapelles et les églises; d’organiser ou de renforcer les capacités des services de sécurité paroissiale pour dissuader toute violation d’espace sacré; de déterminer et de faire respecter les heures d’ouverture et de fermeture des chapelles et églises, et de signaler aux autorités diocésaines et administratives compétentes tout comportement douteux, tout manque de respect au statut et à la nature des lieux de culte.
Monseigneur Edmond n’a pas manqué d’interpeller les autorités publiques. Il leur a demandé une fois de plus de prendre conscience du caractère hautement sensible de tout ce qui touche le domaine religieux et le respect de ceux qui en sont responsables; de garantir le caractère laïc du Tchad et le respect des lieux de culte ; de prendre les mesures qui s’imposent pour sécuriser les lieux de culte et punir tous ceux qui posent des actes de nature à compromettre le vivre-ensemble. NDF