Heureux qui comme les députés de la 3ème législature

Ils résistent à tout processus pouvant conduire à leur départ. Par cinq fois de suite, les députés de la 3ème législature ont connu le report des élections susceptibles de les remplacer par d’autres. Malgré la prise du pouvoir par la junte, ils sont encore en place jusqu’à la mise en place du très attendu Conseil national de transition (Cnt). 

Ni la fin de leur mandat en 2015, ni l’idée des législatives couplées aux élections présidentielles (2016 et 2021) n’ont fait bouger ces députés de leurs bureaux climatisés du Palais de la démocratie de Gassi. Heureux, ils le sont, ces députés de la 3ème législature. Après 10 années de mandature au lieu de 5, ils sont là. Même si certains se disent lassés par un mandat infini, la majorité est toujours fière du statut de “députés illégitimes”. Même le Cmt et le futur Conseil national de transition traînent encore à les faire débarquer.

Bon nombre de personne   avaient pensé qu’à la prise du pouvoir le 20 avril dernier par le Cmt, le mandat des députés de la 3ème législature allait prendre fin. Pas du tout. Le Cmt qui, après avoir suspendu la Constitution et dissout les institutions de la République dont l’Assemblée nationale, pour les remplacer par la Charte de transition et le Conseil national de transition, est très vite revenu sur ses pas. Comme pour récompenser le président de l’Assemblée nationale, Haroun Kabadi, qui a refusé d’assumer les fonctions du président de la République que lui offre la constitution et permis ainsi au Cmt de s’agripper au pouvoir, ce dernier accorde aux députés un bonus jusqu’à la mise en place du prochain Cnt.

On avait cru que la 1ère session ordinaire de l’année 2021 allait être la dernière pour Haroun Kabadi et ses collègues. Que nenni ! Pour l’instant, rien de sûr n’indique qu’ils ne seront pas de retour à l’hémicycle en septembre prochain. Le comité chargé d’élaborer le rapport bilan de la 3ème législature estime être très avancé dans ses travaux ainsi que le président de l’Assemblée nationale qui se dit prêt à passer la main au Cnt. Malgré la mise en place du comité ad hoc chargé de sélectionner les candidatures pour sa mise en place, le Cnt tarde à voir le jour. Certaines rumeurs circulent selon lesquelles le Cmt a un faible pour les actuels députés, voilà pourquoi il semble traîner les pas pour la mise en place du Cnt.

 

Haroun Kabadi fier de lui

“Il a manqué de courage”, “c’est une trahison”, ont qualifié respectivement Ali Abdel Rahamane Haggar (actuel conseiller chargé de la réconciliation et du dialogue inclusif) et Gilbert Maoundonodji (politologue) quand Haroun Kabadi avait refusé d’assumer la fonction du président de la République suite à l’absence définitive du président de la République. Pour la première fois depuis cet évènement, le président de l’Assemblée nationale a donné sa version de fait. Ce 30 juillet, lors de la clôture de la 1ère session ordinaire 2021 de l’Assemblée nationale, le Pan a consacré une bonne partie de son discours à son refus d’assumer ses obligations constitutionnelles. Il a avancé l’argument sécuritaire pour justifier son acte alors qu’au départ on a entendu parler des soucis sanitaires. Pour lui, la Constitution circonscrit uniquement la mission du président de la République intérimaire à l’organisation des élections présidentielles dans un délai de 90 jours. Or, Kabadi trouve que ce délai était intenable vu le contexte sécuritaire étant donné que le président sortant était décédé au front et la stabilité institutionnelle et politique étaient menacées. “Face à une situation exceptionnelle, il faut des réponses exceptionnelles, car j’estime qu’il était utile de parer au plus pressé, de veiller à assurer la stabilité du pays, sa souveraineté, l’intégrité du territoire national et rassurer l’Armée qui combat les groupes terroristes dans les zones du nord Kanem”, argumente le président de l’Assemblée nationale. “De tous ces paramètres politiques et sécuritaires, j’ai décidé de renoncer à exercer mes prérogatives constitutionnelles, et de donner mon accord pour la mise en place du Cmt qui, je crois fermement, était la meilleure solution du moment”, a fièrement expliqué Haroun Kabadi.

La 1ère session ordinaire n’a pas eu beaucoup à faire. Elle a été marquée par les campagnes et élections présidentielles sans oublier la mort de Déby Itno et tous les chamboulements qui ont suivi. Le bilan est maigre : trois projets de loi adoptés et deux projets de résolution (portant prorogation de l’état d’urgence sanitaire et modalités de présentation du programme politique du gouvernement). S’y ajoutent une interpellation du gouvernement et certaines formations en faveur des députés.

Le gouvernement est autorisé à légiférer par ordonnance du 1er juillet au 31 août en attendant le retour de vacances des députés ou la mise en place du  Conseil national de transition.

Lanka Daba Armel