Le personnel féminin de l’hémicycle, réuni dans le comité d’organisation des festivités féminines au sein de l’Assemblée nationale (Coffan), a célébré, à sa façon, du 1er au 8 mars 2021, la Semaine nationale de la femme tchadienne (Senafet) et la Journée internationale de la femme (Jif), sous le thème “Leadership féminin : pour un futur égalitaire dans un monde de la Covid-19”.
Deux activités majeures ont marqué leur célébration. Des actions de bienfaisance en faveur du groupement des femmes handicapées et une conférence-débat. Les donations au profit des femmes vulnérables ont eu lieu le 4 mars, au siège national de l’Association pour l’entraide des handicapées physiques du Tchad (Aehpt), dans le 5ème arrondissement de la ville de N’Djaména. Ces dons ont été constitués essentiellement d’une grande quantité de vivres (riz, huile, sucre, pâtes alimentaires, farine), des détergents (cartons de savon, …) et quelques boîtes de masques.
Les échanges entre femmes, qui ont précédé la réception des dons, ont permis à quelques handicapées de révéler les difficultés auxquelles elles font face. “Dieu merci. J’ai été formée en couture, ce qui me permet de m’en sortir un peu, mais, je n’ai pas les moyens de m’installer, donc c’est difficile”, confie Mme Madina Ousmane. Asbodal Emilienne, mère de deux enfants, ajoute qu’elle est une lève-tôt. 5 h du matin la trouvent généralement hors de la maison. Très souvent, elle se rend à Koundoul, à 25 km, au sud de N’Djaména, acheter des marchandises et autres denrées alimentaires pour revendre dans la capitale. “Mon vœu est qu’il faut nous aider à faire intégrer dans la loi 7, un dispositif qui contraint les hommes à s’assumer et à prendre en charge les enfants. Aujourd’hui, je m’occupe toute seule de mes deux enfants et suis obligée de me débattre. Nous souffrons trop de ces cas d’abandon par les hommes”, plaide-t-elle.
Des témoignages qui conduisent à des recommandations, aux allures de plaidoyer, faites par les femmes handicapées, lors de cette visite très symbolique. “(…) Faire adopter une loi portant promotion des activités génératrices de revenus (Agr) des femmes en situation de handicap du Tchad, tout en exonérant les frais fiscaux et autres taxes ; appuyer financièrement et matériellement les femmes en situation de handicap, pour le développement de leur Agr ; faire la promotion de l’emploi des femmes en situation de handicap dans les secteurs public et privé ; encourager l’inclusion des femmes en situation de handicap dans le quota des 30% accordé aux femmes par la loi”.
En réponse, la directrice adjointe de la communication de l’Assemblée nationale, Mme Kidana Alice Gali, estime que toutes les femmes du Tchad ont un handicap, ce qui les empêche d’être autonomes. “Vous êtes des exemples pour nous, parce que vous vous battez au quotidien malgré vos limites. Nous voulons vous dire que seule la solidarité entre femmes est notre force, pour nous permettre d’aller de l’avant et d’être autonomes. Que chacune prenne la main de l’autre, afin d’avancer ensemble et surmonter les obstacles, pour aller vers notre indépendance”, conseille-t-elle.
La question de droit des femmes handicapées n’est pas occultée par l’association, qui a créé en son sein, un cadre de brassage et d’échanges d’expériences entre les femmes, qui se réunissent tous les 15 et 30 du mois. La plupart d’entre elles refusent la fatalité. Malgré la déperdition scolaire, dont le taux est très élevé en leur sein, certaines sont des diplômées, mais, la question de l’emploi et de la stigmatisation entrave leur épanouissement. Certaines sont dans les affaires, bien que l’environnement soit difficile.
Leadership des femmes et participation à la vie politique
L’objectif recherché à travers la conférence-débat du 2 mars autour du thème “La participation de la femme aux différentes échéances électorales : enjeux et défis” est d’arriver à faire élire des femmes pour atteindre le quota de 30%, consacré par les textes. Un thème choisi à dessein, à l’heure où le Tchad entre dans son cycle électoral, avec la présidentielle à venir. Mbaïoroum Maturin, responsable de la cellule technique du comité d’évaluation des politiques publiques de l’Assemblée nationale, qui a animé la conférence, s’est appuyé sur des données existants pour proposer un scénario optimiste. Le code électoral a évolué à travers l’ordonnance 12 de 2018, instaurant la parité dans les fonctions électives et nominatives. Selon des études, la gouvernance féminine apporte rapidement le changement, informe-t-il. Il rappelle que, lors de la 1ère législature, il y avait trois femmes députées. Pendant la 2ème législature, elles étaient 9 sur 155 députés, soit 5,8%. Et pour cette 3ème législature, elles sont 28 sur 188, soit 14,8%, un ratio supérieur à celui de l’Afrique centrale, qui est de 12%. Si cette évolution se maintient à partir de l’hypothèse qui est multiplier par 3 le nombre des femmes députées à chaque législature, lors de la prochaine, leur nombre sera de 88 sur 162 députés et à la 5ème législature, les femmes seront majoritaires à l’Assemblée nationale. Voilà pourquoi, il faut les inciter au leadership féminin, à l’engagement citoyen et politique, soutenir leur militantisme politique. Pour cela, elles doivent avoir confiance en elles et être convaincues de leur engagement politique. Bref, être des femmes de conviction, conseille-t-il. À l’exemple de Mme Ildjima Abdramane, élue du peuple et député du parti Undr (depuis juin 2011) et de Mme Yoramadjel Gisèle, élue locale du parti Rndt le réveil, conseillère municipale et ancienne maire de la commune du 7ème arrondissement (2012-2020), qui ont témoigné de leur engagement citoyen et politique.
Pour le député Fatimé Tchombi qui a représenté le président de l’assemblée nationale au lancement des activités et à la clôture«(…) Pour que l’engagement citoyen de la femme au Tchad soit une évidence perpétuelle, il faut encore et encore veiller à l’envoi et au maintien des filles à l’école. C’est à l’école qu’incombe le rôle de ‘’Former le futur citoyen’’ à travers plusieurs dispositifs. L’école est le lieu central dans l’apprentissage de la citoyenneté (…)».
La cérémonie de clôture, organisée autour d’un déjeuner dans les jardins de l’hémicycle, a été précédée de la lecture des recommandations suivantes: au président de l’Assemblée nationale, de poursuivre le processus de l’application des 30% des femmes de l’assemblée nationale dans les fonctions nominatives ; encourager et soutenir l’engagement citoyen et politique des femmes ; élargir les prérogatives du comité chargé de l’organisation des festivités féminines au sein de l’assemblée nationale et tenir compte de l’approche genre dans tous les examens des projets qui passent à l’assemblée nationale. Aux femmes de l’assemblée nationale, de développer le leadership féminin et inciter les jeunes femmes à l’engagement politique ; se faire former et s’auto former régulièrement pour répondre aux appels des candidatures aux postes de responsabilité et combattre les stéréotypes de genre, s’intéresser à la vie politique.
Roy Moussa
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