Le chef-lieu de la province du Ouaddaï est assailli par une nouvelle maladie a caractère épidémique appelée chikungunya, dont les symptômes sont assimilables à ceux du paludisme.
Cela fait déjà plus de trois mois que la population de la ville d’Abéché est traumatisée par la présence d’une maladie, presque épidémique, appelée chikungunya. Assimilée au paludisme par ses symptômes, cette maladie est connue localement sous le nom de “Kouryanlé”, un mot arabe locale qui signifierait “maladie de courbature”. Les premiers cas ont été découverts en mois d’avril, après quelques cas de paralysie constatés. Il a fallu attendre un mois plus tard, après analyse de quelques échantillons de sang prélevés et envoyés à N’Djaména pour que le nom scientifique de cette maladie ne soit connu.
Selon Dr Abdelmamoud Chéne, délégué provincial de la santé du Ouaddaï, le chikungunya est une maladie d’origine africaine, découverte en Tanzanie en 1952, avant d’être transportée dans d’autres pays africains, notamment l’Egypte, le Benin, le Kenya, le Soudan, le Nigeria, la RCA, le Sénégal et tout récemment le Congo en 2014 .
Le nom “chikungunya” est d’origine makondée, une langue d’Afrique de l’Est qui signifierait “qui se courbe, qui se recroqueville” et en français “maladie qui brise les os” ou “maladie de l’homme courbé”.
C’est une maladie virale dont l’agent vecteur serait une espèce de moustique de type Aedes aegypti ou le Tigre qui transmet, via le sang, le virus à l’homme par sa piqûre. Elle est une maladie infectieuse tropicale et non contagieuse.
Symptômes
Apres une infection par le virus du chikungunya, le patient présente des symptômes qui se traduisent par des douleurs articulaires particulièrement intenses obligeant le malade à se pencher vers avant. La période d’incubation peut durer une semaine et plus, selon les sources médicales. Après cette période, les douleurs apparaissent notamment au niveau des poignets, des doigts, des genoux, des chevilles et des pieds. Des douleurs qui s’accompagnent de violents maux de tête, de fièvre. Cette maladie qui a un caractère épidémique, n’épargne personne, mais les plus vulnérables sont les femmes et les enfants à cause de leur fragilité. Selon les données rendues publiques par la délégation sanitaire du Ouaddai, cette maladie fait de centaines de victimes par jour. Hormis les cas traités dans les cliniques privées, dans les neuf centres de santé que compte la capitale du Ouaddaï plus l’hôpital général provincial, plus de cinq cent cas officiels sont déclarés. La prise en charge médicale est gratuite, déclare le délégué sanitaire. Mais cette affirmation a été démentie par certains patients rencontrés lors de nos passages dans certains centres de santé et au pavillon des urgences de l’hôpital provincial d’Abéché.
A défaut d’un traitement particulier, les patients se voient prescrire des antalgiques et anti-inflammatoires. Actuellement, la seule stratégie de lutte anti-vectorielle en vigueur, mise sur pied par l’hôpital en collaboration avec la voirie urbaine, consiste à combattre les moustiques par la pulvérisation des quartiers afin d’éliminer les gites larvaires potentiels. Car ces derniers se logent dans les eaux stagnantes propices à la dissémination et à la multiplication des larves des moustiques vecteurs, l’Aedes.
Face à cette maladie qui n’a pas de traitement approprié pour contenir sa propagation vers d’autres villes du pays, Dr Abdelmamoude Chéne invite la population à porter des habits longs et à dormir sous de moustiquaires imprégnées. Il lance, par ailleurs, un vibrant appel à l’endroit des partenaires sanitaires et aux bonnes volontés de secourir les habitants de sa zone de responsabilité assaillie, afin de les préserver des piqures des moustiques Tigres.
Le virus du chikungunya a encore de beaux jours devant lui avec cette saison de pluies, les moustiques vecteurs de la transmission profitent de l’humidité, de la fraîcheur et des eaux stagnantes pour se multiplier malgré la tentative d’opération de pulvérisation des quartiers entamée par la voirie urbaine.
Pour constater de visu et s’assurer de l’ampleur des dégâts causés par cette maladie et réconforter les patients, le gouverneur de la province du Ouaddaï, Brahim Seïd Mahmat, a effectué une visite dans certains centres de santé et l’hôpital général provincial.
Confirmation
Au niveau central, le ministre de la Santé publique et de la solidarité nationale, Abdoulaye Sabre Fadoul, a fait une déclaration le 27 août pour confirmer l’existence de la maladie à chikungunya dans le chef-lieu de la province du Ouaddai.
Cette déclaration intervient après un contrôle au centre pasteur de Yaoundé, au Cameroun, où l’analyse des échantillons a permis de confirmer qu’il s’agit bel et bien de la maladie à chikungunya. Selon le ministre de la Santé, le choix du laboratoire camerounais permet d’effectuer plusieurs analyses pour s’assurer des premiers résultats du laboratoire national. Le silence du ministère de la Santé publique sur l’apparition de la maladie à Abéché, selon lui, se justifie par l’attente des résultats de l’échantillon envoyé au Cameroun pour des analyses.
A l’heure actuelle, l’on compte 6 163 cas de malades à Abéché, 2 cas dans la zone d’Adré et un cas dans le Wadi-Fira, informe l’équipe de la mission dépêchée par le ministère de la Santé, qui a rendu public son rapport le 27 août. Selon le rapport de mission, la maladie à chikungunya se manifeste par de la fièvre, de la céphalée, des douleurs articulaires. Le patient n’arrive pas à se tenir droit, il a de courbatures, etc. La tranche d’âge la plus touchée est de plus de 15 ans.
JT Emmanuel,correspondant à Abéché.
