Les balises d’un système sanitaire performant

Trois projets de loi pour rendre performant le système de santé tchadien sont soumis au vote des députés en fin 2020. Il s’agit de la création d’une Caisse nationale d’assurance santé (Cnas), de la restructuration de la Centrale pharmaceutique d’achat (Cpa) et de la réforme de l’Ecole nationale des agents sociaux et sanitaires (Enass).

Avant de boucler la 2ème session ordinaire de l’année 2020, les députés ont adopté avec 155 voix pour, zéro contre et zéro abstention, le projet de loi portant création de la Cnas. Le ministre de la Santé publique et de la solidarité nationale, Abdoulaye Sabre Fadoul n’a pas eu du mal à convaincre les députés. Dès l’entame des discussions générales, le député Nobo N’djibo souligne que “le projet de loi ne souffre d’aucune ambiguïté, nous allons l’adopter”. La création de cette caisse rentre dans la “vision 2030; le Tchad que nous voulons”. “Elle permet d’assurer une meilleure orientation de l’effort fiscal de l’Etat vers les personnes pauvres tout en amenant ceux qui ont de capacités financières de contribuer dans un esprit d’équité et de solidarité. Elle renforcera également la gouvernance dans la gestion du secteur santé à travers le contrôle et la vérification de la qualité de prestation avant paiement”, explique le ministre de la santé. La Cnass comporte trois régimes. Le premier, dit contributif couvre les travailleurs salariés des secteurs public, parapublic et privé (formel). Le 2ème régime contributif est composé des travailleurs indépendants ou libéraux  et le 3ème régime dit non contributif concerne les personnes économiquement démunies. Selon le président de l’Assemblée nationale, Haroun Kabadi, la définition du 3ème régime est très complexe, cela risque de donner du fil à retordre au gouvernement même si le ministre de la Santé publique préconise attribuer des immatriculations. L’autre défi qu’il a souligné pour le gouvernement, c’est d’arriver à convaincre les Tchadiens à cotiser pour cette caisse. Le député Moussa Kadam lui trouve que l’aspect solidarité est omis par cette caisse car, remarque-t-il, “la faim également rend les Tchadiens malades” et demande également la mise en place du code de sécurité sociale. Le député Ibni Oumar Daoud espère que la Cnas, qui va être opérationnelle en 2021, ne va pas connaître les problèmes que la politique de la gratuité des soins.

Mais deux jours avant, les députés ont également adopté le projet de loi portant restructuration de la Centrale pharmaceutique d’achat (Cpa). Avec cette restructuration, la Cpa pourra accomplir d’autres tâches que de stocker et fournir des médicaments aux hôpitaux et centres de santé. Elle pourra désormais importer les équipements médicotechniques, les réactifs et appareils de laboratoire, fabriquer localement certains médicaments basiques. Les pharmacies provinciales d’approvisionnement (Ppa) sont directement rattachées à la Cpa pour une meilleure disponibilité et aussi rendre abordable le prix des médicaments dans les provinces. D’après le ministère de la Santé publique, cette restructuration évitera que les produits de qualité inférieure ou falsifiés arrivent dans les structures sanitaires et d’harmoniser les prix des médicaments en éliminant les marges de bénéfice entre la Cpa et les Ppa et d’assurer une traçabilité des produits.

Dans ce train de réforme, l’Ecole nationale des agents sociaux et sanitaires (Enass) n’est pas omise. Elle devient désormais l’Ecole supérieure de santé et de l’action sociale (Enssas). Elle est alignée au système Licence-master-doctorat (Lmd). Ce qui signifie que le niveau minimum pour y être recruté est le baccalauréat. L’autre objectif de cette réforme est également l’harmonisation des curricula des Enass des provinces.  La création du cycle supérieur, d’après  le ministre de la Santé publique permettra de limiter le flux des agents de son ministère à l’étranger pour des raisons d’étude. Ils sont à plus 600. Pour ce faire, les spécialités suivantes seront rendues progressivement disponibles à l’Enssas: anesthésie-réanimation, ophtalmologie, laboratoire, enseignement/administration, soins à l’enfant ou puériculture, génie sanitaire/assainissement, bloc opératoire, santé publique, gestion des services de santé, odontostomatologie, oto-rhino-laryngologie, nutrition, imagerie médicale et kinésithérapie.

Dans la filière sociale, il y aura : éducation surveillée, éducation préscolaire, réinsertion des personnes handicapées et personnes de 3ème âge, développement communautaire, économie familiale, travail social en entreprise et communication sociale.

Dans les discussions générales, les députés ont demandé au ministère de corriger l’injustice faite aux lauréats de l’Enass qui, après trois ans de formation sont recrutés à la Fonction publique avec l’équivalent de Bac+2. Ils ont aussi demandé au ministère d’avoir un regard particulier sur la formation, surtout dans les écoles privées de santé. “Aujourd’hui, pour faire une perfusion à l’hôpital, on vous blesse 10, 15 fois parfois même sans réussir à le faire”, regrette le député Biouh Pabamé Dallah.

Lanka Daba Armel