Les courbettes de Kabadi

Les génuflexions et l’adulation excessive d’un chef d’Etat ont encore de beaux jours sous nos cieux. Une parfaite illustration vient de nous être administrée au fort de la cérémonie hyper médiatisée d’élévation du président Déby “à la dignité de Maréchal du Tchad”, le 11 août 2020. Elles viennent agrandir la race de tchadiens qui se donnent le malin plaisir  à vouer une adoration à leur semblable.

Ainsi, après Oumar Boukar, l’actuel maire de la ville de N’Djaména qui, en saluant le président Déby au cours d’une cérémonie au Palais rose a courbé l’échine devant lui -une scène dont l’image a été virale sur les réseaux sociaux et suscité de nombreux commentaires- c’est  le tour du président de l’Assemblée nationale, Haroun Kabadi, de s’incliner devant la même personne, à l’occasion de la cérémonie de son élévation au rang de maréchal du Tchad au Palais de la démocratie de Gassi. Une scène retransmise en direct à la télévision nationale et vue par de milliers de tchadiens. A trois reprises, Kabadi s’est incliné devant le maréchal du Tchad aux yeux du monde entier. D’abord en accueillant Déby au perron du Palais de la démocratie, ensuite après son discours et enfin pour féliciter son maréchal.

Mais le comble a été atteint lorsque le président de l’Assemblée nationale, deuxième personnalité de la République s’est permis de s’incliner devant la première dame comme s’il l’adorait. Des gestes aux antipodes des valeurs de liberté et de respect promues par la démocratie, dignes de ceux pratiqués au Moyen-âge et plus proche de nous dans les empires du nord où les rois étaient vénérés par leurs sujets.

Même dans son discours de circonstance, Kabadi n’a pas fait dans la dentelle, les mots et les phrases sont choisis et tous conduits dans le sens d’une forte adulation du maréchal.

Au 6ème siècle avant Jésus-Christ, les empereurs romains étaient divinisés par leurs vassaux lors d’une apothéose, le roi était souvent considéré comme le père de la nation. Ainsi, ceux qui rendaient au roi des respects extraordinaires en se prosternant ou s’inclinant devant lui obtenaient de grandes faveurs et la protection de celui-ci. Un tel acte, posé le jour où le président Déby Itno a été porté au firmament de sa gloire militaire et, surtout par une si grande personnalité, vient sceller l’idylle entre le maréchal et Kabadi.

Le respect est dû, dans un monde libre, à tout être humain quel que soit son rang social, son âge ou son niveau d’instruction. Cependant, lorsque cela va au-delà de la limite humaine, il ne peut que conduire au ridicule.

 Togmal David