“Le Moyen-Chari est le grenier sportif de toutes les disciplines”

Le président de la Ligue provinciale du football du Moyen-Chari, Ahmat Sacko, explique pourquoi sa province est au creux de la vague, en dépit d’être le vivier attitré des sportifs dans toutes les disciplines.

Nous avons mis exactement un an et un mois à la tête de la Ligue provinciale de football du Moyen-Chari. A notre arrivée, nous avons trouvé une ligue désorganisée et dépourvue de tout. Mais avec l’appui des autorités locales et de la fédération, nous avons pu relancer les activités, organiser le championnat national U15 et U17, et fait participer une de nos équipes féminines au championnat national en décembre dernier, à Moundou. Malheureusement, en ce moment, le nombre des clubs décroît. De huit clubs, nous sommes revenus à cinq. Cela pourrait s’expliquer par le manque de sponsors.  Car, ce sont les mécènes et quelques bonnes volontés qui dirigent les clubs avec leurs maigres moyens. Et gérer une équipe de football n’est pas chose aisée. C’est qu’une partie des difficultés que nous rencontrons. Mais notre équipe dirigeante a l’ambition de redynamiser le football ici, avec pour slogan le changement et la promotion du football à la base. Je suis en train de voir avec la fédération comment renforcer les centres de formation, pour rehausser le nombre des clubs. Nous gérons également trois départements: le Barh-Kô (Sarh) avec 5 clubs, la Grande Sido (Maro) avec 10 clubs et le Lac Iro (Kyabé) avec 8 clubs. Malheureusement, le Lac Iro n’a pu organiser son championnat, parce que tous les membres du bureau de la ligue sont des fonctionnaires qui sont tous affectés ailleurs cette année.

Est-ce que le département de Barh-Kô qui abrite le chef-lieu de la province a pu organiser le championnat?

Oui, nous avons fini la phase aller et entamé la phase retour, mais la pandémie  de coronavirus est venue tout stopper. Nous sommes une ligue qui dépend de la fédération, et bénéficions de ses subventions pour notre fonctionnement. A notre tour, nous appuyons les ligues départementales afin qu’elles organisent leurs championnats. Nous avons reçu cette année de la fédération 80 ballons pour les jeunes et les seniors. La fédération fait ce qu’elle peut avec ses moyens disponibles, même si des difficultés existent toujours.

  Quel est l’apport des joueurs du Moyen-Chari dans la sélection nationale?

En fait, le Moyen-Chari et particulièrement Sarh a été de tout temps le grenier des sportifs toutes disciplines confondues. Malheureusement ces derniers temps, on constate un relâchement. Lorsque nous avons organisé les championnats U15 et U17, c’était dans le but de détecter les jeunes talents. Nous avons trois jeunes qui ont été identifiés par le staff technique de la fédération. Probablement qu’ils feront leur début avec les Sao, je présume. Il y a des talents indéniables par ici mais ce qui manque, c’est la motivation. S’il y avait des sponsors pour appuyer les équipes, certainement que beaucoup de jeunes feront l’objet des transferts vers les clubs de la capitale. La plupart de ces joueurs sont des élèves et étudiants. Se dépenser aux entraînements et rentrer sans compenser l’énergie, puis étudier et dormir le ventre creux, c’est difficile. Ce qui fait que leur carrière est de courte durée. Deux à trois ans maximum, faute de soutien et d’appui. Dieu merci, la délégation de l’Onajes vient d’être implantée dans la province et nous sommes en train de voir ensemble comment maintenir ces jeunes au football. Il est difficile d’appuyer les clubs et les joueurs avec nos maigres ressources. Nous nous limitons à appuyer les ligues départementales, les arbitres et les staffs techniques.

  Pour organiser un championnat, il faut combien en termes de moyens financiers?

Cela relève de la compétence des ligues départementales et dépend aussi du nombre des clubs engagés, du montant des affiliations et des autres charges. Par le passé ici à Sarh, le montant des affiliations est fixé à 150 000 francs. A notre prise de fonction, nous sommes redescendus à 50 000 francs. Et là même, ce sont quelques bonnes volontés qui s’engagent à payer pour les clubs. Pour avoir un football compétitif, il faut des moyens et un budget conséquent pour la récupération surtout et les équipements. Si vous êtes engagé dans un championnat et que l’alimentation des joueurs n’est pas équilibrée, quelles que soient ses performances, un joueur ne peut pas tenir. Nous avons initié une quête auprès des agences et entreprises de la place pour organiser les éliminatoires de la coupe, cela n’a rien donné. Tout le monde se plaint que c’est arrivé à un moment difficile. De l’autre côté, nous avons vu avec la fédération pour nous appuyer dans l’encadrement et le recyclage des arbitres et officiels de match. Cela a été approuvé et des instructeurs devraient descendre à Sarh pour cela. Malheureusement, la pandémie de la Covid-19 a mis en stand by la formation. Avec la levée des mesures, nous attendons les consignes de la fédération pour la reprise des activités.

Aujourd’hui, tout est lié à l’argent, sans quoi on ne peut pas organiser un championnat. Dans la province, c’est le département de la grande Sido qui s’en sort mieux, parce qu’il est beaucoup appuyé par les humanitaires et les Ong diverses qui y travaillent. Ce qui fait que la ligue de Sido compte 10 clubs et Sarh le chef-lieu n’en compte que 5. Nous sommes allés échanger avec les responsables de là-bas, pour nous enquérir de leur expérience. Cela a été très bénéfique et nous comptons copier leur savoir-faire pour le dupliquer dans les autres départements, surtout en ce qui concerne le regroupement des jeunes. Mais cela nécessite des moyens. Il faut l’appui des autorités locales et de la fédération. Nous avons une localité (Korbol) qui est érigée en quatrième département. Nous comptons nous y rendre pour évaluer la pratique du football et mettre en place une ligue pour coordonner les activités.

Roy Moussa