Depuis quelques semaines, les tchadiens assistent à l’interpellation tous azimuts des pontes du régime qui sont soupçonnés de détournements des deniers publics. Beaucoup de cadres indexés attendent la convocation de la Police judiciaire. En tout cas, le climat est délétère au Palais au rose.
Depuis qu’un des gros poissons est tombé dans les mailles du filet de l’Inspection générale d’Etat (Ige), certains dorment avec un seul œil. Ils sont en train d’aboyer partout et ne savent plus où mettre la tête. C’est le branle-bas de combat chez les prédateurs et ceux qui sont habitués à vivre des rapines. La ville de N’Djaména bruit de folles rumeurs. Cette fois-ci, le régime a décidé de faire la peau aux voleurs et détourneurs des deniers publics qui écument les arcanes du pouvoir. L’étau se resserre autour de certains pontes du régime qui ont indument perçu l’argent du contribuable tchadien. A l’Ige, on se frotte les mains, espérant que ceux qui ont ruiné l’économie nationale puissent répondre de leurs actes devant les juridictions du pays. Les aigrefins de tout acabit qui ont mis à sac les ressources financières du pays ne vont plus échapper aux fourches caudines de la justice tchadienne. Même si les magistrats sont souvent vénaux et soumis aux injonctions du pouvoir. Les règlements de comptes politiques par l’entremise de la justice sont habituels, à l’exemple du Cameroun avec l’opération “Epervier”.
Pour le peuple, cette justice doit prouver sa crédibilité en disant rien que le droit et infliger une correction exemplaire aux bandits au col blanc. Les observateurs attendent, eux aussi, de voir au clair avant de se prononcer, puisque ce n’est pas pour la première fois que le régime traque les satrapes et autres auteurs des crimes économiques. Une fois embastillés, ceux-ci recouvrent la liberté et sont promus à la surprise générale à des hautes fonctions de l’Etat. Et pour corroborer cela, les exemples sont légions. Sinon, c’est une opération de charme en direction des partenaires au développement puisqu’on est à un pas des législatives et municipales. Le pouvoir Mps en perte de vitesse à cause de sa gestion scabreuse, cherche à travers cette opération de communication à obtenir l’appui technique et financier de la communauté internationale qui attend des garanties suffisantes avant de mettre la main au porte-monnaie pour permettre à la Commission électorale nationale indépendante (Céni) d’organiser ce scrutin couplé que l’on traîne depuis des lustres.
Entretemps, certains oligarques proches du régime qui ont opéré des pillages à ciel ouvert se pavanent là sans être inquiétés. Ces grosses baleines sont souvent des intouchables puisqu’elles appartiennent au sérail. Mais ce sont quelques menus fretins qui font les frais de ce genre d’opération.
Une longue liste de hauts fonctionnaires indélicats et supposés s’être rendus coupables de détournement des deniers publics circulent déjà sous le manteau. Les jours à venir seront décisifs et déterminants dans le cadre de l’assainissement des finances publiques que le pouvoir entend réaliser. Tout le monde s’attend à ce que l’Ige réalise les prouesses de la défunte Igce (Inspection générale de contrôle d’Etat) dirigé à l’époque, respectivement, par Ibrahim Mahamat Itno, Ngarlejy Yorongar Salomon, Korom Ahmed et Routouang Yoma Golom. Ce dernier a pris les manettes du département lors du dernier remaniement gouvernemental opéré par Hissène Habré le 10 octobre 1990. Son ministère a infligé une cinglante déculottée aux fonctionnaires véreux et a bien moralisé les cadres de l’administration publique. Son action a permis de décourager les éventuels corrompus de la Fonction publique. En son temps, tout le monde avait peur de piocher un kopeck dans la caisse de l’Etat. Ces ministres qui étaient chargés de mettre en musique les instructions du gouvernement de l’époque, certains sont encore vivants. On pouvait bien se servir de leurs recettes pour permettre à l’Etat tchadien qui fait face à la pénurie financière de récupérer son argent volé. La récupération de ces fonds spoliés viendrait certainement renflouer ses caisses qui sont aujourd’hui désespérément vides. Et peut-être lui permettre de résoudre la crise sociale qui secoue le pays depuis plus de trois ans à cause des mesures impopulaires qui ont permis de pénaliser injustement les fonctionnaires.
Laldjim Narcisse Mbaïnadji