Les préalables de Wakit Tama

La Coordination des actions citoyennes Wakit Tama a transmis un document de 4 pages au Conseil militaire de transition (Cmt). Un document dans lequel Wakit Tama dit vouloir faire partie des solutions aux problèmes politiques du Tchad si le Cmt se soumet à ces prérequis.
Au début, on était loin d’imaginer un rapprochement entre les deux parties (Cmt et Wakit Tama). Dès la prise du pouvoir des militaires le 20 avril 2021 dans la foulée du décès du président Idriss Déby Itno, Wakit Tama, qui manifestait déjà contre le 6ème mandat de ce dernier n’a pas rangé les armes. La coordination des actions citoyennes qualifie la mise en place du Cmt d’un coup d’Etat et d’une succession dynastique à la tête de l’Etat, le Cmt étant dirigé par le fils du défunt président et refuse de reconnaître son autorité. Il s’en suit une série de manifestations contre le Cmt qui rétorque en réprimant violemment les manifestants pour dire que c’est désormais lui qui détient le monopole de violence légitime au Tchad. Bilan, plus de 16 manifestants tués, parfois suite à des tirs des balles réelles, plusieurs blessés et des arrestations.
Mais plus d’un mois et demi après le décès de Déby, les deux parties semblent mettre de l’eau dans leur vin. La dernière marche de Wakit Tama contre le Cmt qui remonte au 19 mai dernier s’est soldé par un mort. Et même la coordination des actions citoyennes continue à refuser de reconnaître la légalité et l’autorité du Cmt, elle accepte désormais de dialoguer avec lui, par pragmatisme, mais pas à n’importe quel prix.
Dans la note adressée aux autorités de la transition, la coordination des actions citoyennes demande au Cmt de “créer des conditions de confiance mutuelle” pour jeter la base à la tenue de la “Conférence souveraine et inclusive de transition”. Ces préalables sont entre autres la libération sans condition des marcheurs arrêtés, l’indemnisation des familles des marcheurs tués, l’ouverture d’une enquête indépendante pour identifier les auteurs des tueries lors de la marche du 27 avril. Il est aussi demandé la libération immédiate des prisonniers de guerre et d’opinion, l’autorisation de la tenue des meetings, des marches et manifestations pacifiques. Outre cela, le Cmt doit exprimer ouvertement sa disponibilité à dialoguer avec les politico-militaires.
Wakit Tama attaque frontalement le Cmt en demandant sa mutation en Conseil républicain de transition (Crt) dirigé cette fois par un civil secondé d’un vice-président chargé de la sécurité. La coordination des actions citoyennes dit s’étonner du comportement des militaires qui veulent figurer au Conseil national de transition (Cnt) et au gouvernement de transition mais refusent que les civils fassent partie du Cmt. La coordination insiste sur la tenue du dialogue (souhaité pour le 11 août) avant la mise en place de n’importe quel organe de transition. “Le trio de l’exécutif (président et vice-président chargé de la sécurité du Crt et le premier ministre de transition) s’engagera par écrit à ne pas participer aux élections qui résulteront de la période de transition”, précise le document. Une mutation du Cmt en Crt implique nécessairement la modification de la charte de transition qui donne, pour le moment, le pouvoir de nomination et de révocation au président du Cmt. Cette charte de transition modifiée doit limiter l’action du Crt sur la période d’ici l’organisation de la Conférence nationale inclusive de transition (Cnit) et indiquer clairement que le gouvernement actuel n’est qu’un gouvernement de pré-transition, car pour Wakit Tama, la transition commence après la Cnit. En dernier point, la coordination insiste sur “la création consensuelle d’un comité indépendant autonome pour la Conférence nationale inclusive de transition avec à sa tête, des personnalités crédibles et suffisamment neutres politiquement pour restaurer la confiance entre les acteurs”. Elle appelle “l’Union africaine et les Nations unies à appuyer le processus du dialogue en créant un groupe de contact dirigé par un ancien président de la région du Sahel connu pour sa connaissance des enjeux et son respect de la démocratie”.
Wakit Tama présente ces préalables comme éléments majeurs pour la suspension des marches et des actions de désobéissance civile.

Lanka Daba Armel