Suite à la grève générale lancée par les syndicats du secteur public, le service minimum instauré dans les structures sanitaires impose une sélection rigoureuse des malades à soigner. Ce qui n’est pas sans conséquence.
La semaine écoulée a été très difficile pour les Tchadiens malades. Dans les structures sanitaires, les visages sont crispés, des lamentations vont grandissantes à cause des rendez-vous médicaux annulés, du renvoi des séances de consultations, etc. A l’hôpital général de référence nationale (Hgrn), règne un climat d’inquiétude. Devant chaque service, des malades s’entassent. Tous attendent désespérément l’arrivée d’un médecin. Les multiples queues et bousculades qui s’observaient devant les caisses sont peu visibles cette fois. Devant l’unique caisse opérationnelle, la plupart des patients viennent pour payer les frais des opérations urgentes ou des bulletins d’examen prescrits par les médecins avant la grève. Au service de la radiologie, toujours rempli, on observe seulement la présence des patients qui attendent leurs résultats.
Au rythme des services minimum
La règle du service minimum est très simple, mais, difficile à déterminer pour un corps étranger au domaine. Les malades se présentent à l’hôpital munis de leurs carnets, puis les infirmier(e)s font la consultation. Après celle-ci, ils envoient les carnets dans le bureau du médecin. Il revient à ce dernier de trier en fonction de la gravité de la maladie pour poser le diagnostic. Il peut orienter les autres cas moins graves dans les cliniques ou prescrire des calmants en attendant la reprise à temps plein. “En temps normal, nous sommes sept dans ce service, mais, le contexte a réduit le nombre à trois. Nous ne pouvons pas diagnostiquer tous ces patients parce que nous sommes débordés. Toute maladie nécessite une prise en charge, mais, certaines situations ne sont pas graves, comparées aux autres. Donc, elles peuvent attendre”, raconte l’unique médecin rencontré au service de consultations externes. Ce qui n’est pas du goût des patients, qui insistent à rencontrer un médecin. “La douleur ne peut attendre ma fille, il faut juste me dire le problème”, se plaint une patiente auprès d’une dame en blouse. “Ils m’ont dit de prendre ces médicaments (tenant une ordonnance en main) en attendant la semaine prochaine pour me situer sur mon cas. Pourtant j’ai passé une très mauvaise nuit”, explique cette même dame aux autres patients. Dans les centres de santé, souffle le vent du silence. Ces structures qui d’emblée manquent cruellement de matériels de prise en charge médicale, n’existent quasiment plus à cette période de grève. Deux jours après le mot d’ordre de grève lancé par la plateforme syndicale, le centre de santé d’Habena est devenu vide. Juste deux dames en blouse sont à la réception. Elles font la consultation et demandent aux malades de patienter, quand la situation n’est pas préoccupante et que le médecin est occupé. Au cas contraire, elles les réorientent à l’hôpital central. Seuls quelques malades, déjà internés, bénéficient de quelques soins.
L’exception dans les structures privées
Les cours des hôpitaux, tels que la Renaissance, de la Mère et de l’Enfant, de la mosquée et de Notre Dame des Apôtres, sont toujours bondées. Les services fonctionnent normalement et l’impact de la grève est très peu visible. Ceci est dû à leur statut totalement différent des autres. Ils ont un pourcentage élevé des contractuels. A l’hopital la Renaissance, les contractuels représentent 50% du personnel. A la Mère et de l’Enfant et à l’hôpital de la Mosquée, 80% du personnel sont contractuels.
Pour Younous Mahadir, président du Syndicat des travailleurs des affaires sociales et de la santé (Syntass), “La grève ne peut avoir assez d’impact sur leurs activités parce qu’ils emploient un grand nombre de contractuels, mêmes si certaines spécialités dans ces hôpitaux sont fermées. Tout de même, ils sont solidaires et suivent de près l’évolution de la situation. Par exemple, l’hôpital de la Mère et l’Enfant, fonctionne, mais, reste le mieux organisé et est la meilleure cellule de base des syndicats”, explique-t-il.
Sur le plan général, la grève est suivie à 100 % dans les provinces, selon le président du Syntass, même si elle n’incarne aucune intention de faire du mal aux personnes malades. “Notre objectif n’est pas de faire du mal à la population, mais, d’attirer l’attention du gouvernement sur le non-respect de certains de ses engagements. Aussi, il faut savoir que ce sont les agents qui ont exigé cette grève”, défend-il. Il annonce qu’une rencontre aura lieu, regroupant les directeurs des hôpitaux, pour décider de la suite à donner à cette grève.
Nadjindo Alex