Le Pr. Avocksouma Djona Atchénémou a présenté le samedi 15 janvier 2022 au Céfod, ses trois derniers ouvrages parus en décembre 2021.
Des œuvres qui touchent le vécu des citoyens et abordent les questions sociétales. Elles portent également sur la politique et ses pratiques en République du Tchad, et interpellent les dirigeants, les citoyens sur la gestion de la chose publique. L’auteur n’hésite pas à faire des propositions utiles pour apporter des changements nécessaires dans le pays.
“J’avais décidé de privilégier les maisons d’éditions tenues par les compatriotes”, informe l’un des auteurs et écrivains tchadiens devenu le plus prolifique. En effet, les trois ouvrages ont été édités respectivement par les Editions le Pays que dirige notre confrère Madjiasra Nako (N’Djaména-Tchad), pour l’œuvre “Mon enfant, viens t’accompagner” présentée par Me Clarisse Nomaye, les Editions Maïna Manga (Paris-France) pour l’ouvrage titré “Gor Zulan, le petit trou de Goro Waga” présenté par Béré Célestin et les éditions les Koushites enchaînés dirigé également par un autre compatriote Nadjikimo Bénoudjita résident à Montréal (Canada) pour l’œuvre “Bon pied ne ment pas” présenté par Ngardobé Roy Moussa.
L’auteur a l’avantage d’avoir un fil conducteur, à travers un personnage central qui traverse ses œuvres romanesques, suivant une succession de thèmes. Ce qui explique que dans certaines de ses œuvres, le lecteur entre directement dans le cœur du récit, qui prolonge des œuvres antérieures. Le lecteur non averti sera surpris de ne point voir une préface, une dédicace ou une page de remerciements qui ouvrent généralement bon nombre d’œuvres romanesques. Comme quoi, le Pr. Avocksouma invite le lecteur à lire également ses précédents romans. Dans la plupart de ses œuvres, le Pr. Avocksouma fait la part belle au dialogue et aux débats contradictoires. Le tout, narré dans un style d’écriture qualifié de brouillage, qui tente d’égarer le lecteur en l’éloignant du sujet, mais le tient en éveil tout en aiguisant sa curiosité. Ce qui appelle le lecteur à de profondes réflexions culturelles, socio-anthropologiques, politiques, philosophiques et l’installe dans le questionnement du for intérieur, de l’autocritique et du regard sur la société. Les œuvres d’Avocks établissent un lien intime avec l’auteur, et font large étalage de ses connaissances aussi bien techniques, scientifiques que sociales. Le Pr. Avocksouma n’hésite pas à faire profiter le lecteur de ses expériences acquises dans divers domaines au cours de ses multiples voyages à travers le monde, qu’il met en partage.
Promouvoir les œuvres, une opportunité
La théâtralisation voulue par l’auteur, souvent dans ses œuvres, est entraînante. A travers son habillage et le déshabillage, les scénarios qu’il propose quelquefois sont dans un langage accessible, où chacun et chacune se reconnaît et se sent concerné, parce que le texte utilise des mots, vocabulaires, phrases et expressions usuelles qui sont proches du commun des mortels. Ce sont des œuvres qui sont également porteuses des messages du “Vivre-ensemble” tant prônés. Proposer une large diffusion de ces œuvres, permettra d’instaurer des débats dans divers milieux, afin de rapprocher les différents points de vue, de façon à avoir une vision humanisant de soi et de son prochain. Ce qui contribuerait à rapprocher les “Hommes”. Les écrivains tchadiens de manière générale, dont les textes sont porteurs d’autant d’enseignements et de messages, sont rarement mis en scène. Une manière de mieux les faire connaître du grand public, c’est justement de mettre en scène leurs textes, car leurs œuvres coûtent chers et ne sont pas toujours accessibles à tous.
Lors des échanges débats avec le public, l’auteur a admis que toutes ses œuvres sont inspirées de son vécu à travers diverses expériences. Ce qui a conforté Emmanuel D’nalbaye, socio antrhopologue et enseignant-chercheur dans son analyse : “Je m’incline davantage sur la qualité littéraire de l’auteur. Au détour de chaque paragraphe, vous apprenez quelque chose de scientifique. Mais le constat est que toutes ces œuvres sont de l’autobiographie”.
La culture ne nourrit pas son homme
Mais qu’est-ce qui fait courir le Pr. Avocksouma, pour avoir une plume aussi abondante ? “Pour être honnête, c’est pour vivre. Je ne veux pas mourir et disparaître pour de bon sans laisser de trace. J’aurais bien aimé gagner des prix, mais il semble que c’est plus difficile qu’on le croit. Il n’y a rien de facile au pays de Toumaï. Même dans un domaine comme celui de l’écriture, les règles du jeu sont des plus opaques (…) Je ne sais pas comment les autres écrivains vivent de leurs écritures. En 2019 et 2020, on m’avait proposé la somme de 40 000 francs l’année et pas plus tard qu’hier, le ministère en charge de la culture a été plus généreux en voulant me “récompenser” de la modique somme de 90 000 francs. Je ne sais pas ce que l’on tente de financer, mais j’ai toujours refusé cette “aide”. J’ai toujours considéré que c’est une façon de provoquer ma pauvreté. C’est d’ailleurs en réaction aux attitudes des autorités en charge de la culture que l’idée d’écrire le livre Bon pied ne ment pas m’était venue (…) Accepter de vivre des activités culturelles au Tchad, c’est vouloir compter sur la mendicité”.
Roy Moussa
