Ce jour, 28 novembre 1958

Rappel du déroulement de la cérémonie de proclamation de la République du Tchad. La séance est ouverte à 15 h 45, sous la présidence de Sahoulba Gontchomé, président de l’Assemblée territoriale. Il y a 62 conseillers présents sur 65. Après les formalités d’usage, le président de la séance passe la parole  au président de la Commission des législations, des règlements et de la Fonction publique de l’Assemblée, Me Maurice Bets (français). Celui-ci lit, à l’attention des  conseillers, le texte de la délibération soumis à leur approbation. Ce texte stipule: “Article 1er : Le Territoire du Tchad manifeste sa volonté de devenir un pays membre de la Communauté.

Article 2 : l’Etat autonome du Tchad prend le nom de République du Tchad”.

Puis, Me Bets lit le rapport de la commission des législations, des règlements et de la Fonction publique. Dans ce rapport, elle se déclare “extrêmement favorable” à l’adoption du projet de délibération portant proclamation de la République, car, “ce projet répond à la fois aux vœux du législateur de la Constitution du 4 octobre 1958 et à ceux de la quasi-unanimité des populations du Tchad”.

Le groupe parlementaire Union socialiste tchadienne (Ust), par la voix du conseiller Jean Baptiste, propose le vote d’une motion préjudicielle pour remercier la France tout en sollicitant son aide technique et financière. A 16 h 30, le texte est adopté par des applaudissements nourris de toute l’Assemblée debout et enthousiaste. 10 mn après, le chef du Territoire, René Troadec, représentant la France, fait son apparition dans la salle de l’Assemblée, prononce un discours et appose sa signature au bas de l’arrêté n° 795/SG qui rend exécutoire la délibération 93/58. Puis, c’est le tour du vice-président du Conseil de gouvernement, Gabriel Lisette de prendre la parole. Il rend un hommage au général de Gaulle avant d’appeler à l’unité des fils du Tchad et à la coopération sous-régionale. Ensuite, Me Bets dépose une motion pour exprimer une reconnaissance à Gabriel Lisette pour son dévouement pour la cause tchadienne.

La séance est levée à 17 h 20 mn. Une grande page de l’histoire du Tchad vient d’être ainsi tournée. Mais c’est aussi un pas dans l’inconnu qui vient d’être franchi. La première conséquence de cette proclamation a été l’élaboration d’une “petite constitution provisoire” en 8 articles, appelé “Acte constitutionnel n°1”. Aux termes de ses dispositions, l’Assemblée territoriale devient “Assemblée législative constituante” et exerce le pouvoir législatif, le conseil de gouvernement devient le “gouvernement provisoire” et exerce le pouvoir exécutif. La deuxième conséquence est la formation le 8 décembre, par Gabriel Lisette, du premier gouvernement provisoire d’union de la République. Dans ce gouvernement de 17 membres, se retrouvent tous les leaders politiques. Mais un tel gouvernement, réunissant des hommes aux ambitions si antagonistes ne peut qu’échouer. La preuve est que le 10 février 1959, le gouvernement d’union a été renversé alors que Lisette se trouvait à Paris. Le Tchad sombre dès lors dans une instabilité gouvernementale dont il ne sortira qu’en mars avec l’arrivée de François Tombalbaye à la Primature

Dr. Arnaud Dingammadji,

Historien