Ces maisons de productions qui essayent et s’essayent

Il existe plus d’une dizaine de maisons de production implantées à N’Djaména, avec des équipements de fortune ou professionnels adaptés. Les promoteurs tentent non moins sans succès de réaliser, promouvoir et valoriser les œuvres audiovisuelles.

La question de la production et de la promotion des œuvres artistiques et culturelles tchadiennes de qualité, en national et à l’international, est souvent au cœur des débats et toujours d’actualité. Ces maisons de production disposent des studios d’enregistrement et des équipements de montage, mais éprouvent des difficultés à réunir des spécialistes dans les domaines concernés. Ce sont la Compagnie Hadre Dounia, Excellence communication, Shalom, 3XL, Satchaprod, Label 109, DMD, Preston, Rod Production, Electron, Baba Moustapha, etc. Deux exemples de réussite méritent un clin d’œil.

Jean Kevin Ngangnodji alias Hadre Dounia (Photo Boy)

est comédien, producteur et responsable du Centre culturel Koulsy Lamko situé à Habéna. Il s’est lancé dans la production à cause des difficultés rencontrées lors de ses multiples démarches, pour produire et promouvoir ses œuvres. Sans une maison de production locale, l’accompagnement des artistes sera difficile. Depuis la fixation de l’œuvre au studio jusqu’à sa sortie, il faut lâcher beaucoup d’argent, parcourir des pays avec tous les risques, à la recherche d’une maison spécialisée. Son initiative participe aussi de la mutation vers des spécialités qui manquent grandement au Tchad. Pour cela, il a suivi diverses formations qui lui ont permis de créer en 2013 son studio. Son objectif aujourd’hui, c’est de donner la chance aux autres d’avoir au moins un support, qui pourrait les aider à rechercher des producteurs et/ou des hommes de bonne volonté qui puissent les soutenir dans la promotion de leurs œuvres produites, explique-t-il. Le studio Hadre Dounia est une structure qui fait partie de la Compagnie Hadre Dounia, association culturelle qui regroupe en son sein, toutes les corporations artistiques. La musique est mis au-devant, pour permettre aux comédiens d’enregistrer leurs sketches afin d’assurer leur visibilité. Pour Hadre Dounia, dès qu’un jeune est détecté talentueux, la compagnie l’accompagne dans l’enregistrement d’un ou de deux titres et des démarches auprès des mécènes qui peuvent le soutenir. Les aspects comme la morale et l’éthique sont mis en avant dans la direction artistique, afin de recadrer les textes de l’artiste et surtout rechercher l’identité musicale tchadienne. Le constat est que beaucoup de musiciens tchadiens s’orientent vers les tendances importés d’ailleurs. Aujourd’hui, la création d’un centre culturel obéit à un besoin d’accompagnement des artistes, afin qu’ils disposent d’un pied à terre pour prester et non finir dans les bars comme de coutume, une fois sortis d’un spectacle à l’Institut français du Tchad (Ift).

Son studio a pris feu, suite à un court circuit. Malgré les diverses démarches menées pour sa réhabilitation, personne n’a daigné lever le petit doigt pour venir en aide. La compagnie s’est assumée pleinement pour se reconstruire. C’est pourquoi, Hadre Dounia se dit fier d’avoir su remonter la pente et aujourd’hui assurer sur la scène tchadienne, l’enregistrement, le coaching et la production de bon nombre d’artiste. La situation de la Covid-19 n’est qu’une difficulté en plus de celles existantes et n’a pas véritablement été une difficulté nouvelle.

Djerabé ndigngar (Photo Boy)

Réalisateur, Djérabé Ndigngar est producteur et responsable de la plateforme musicale SaTchaProd music.com. Sa structure fait de la production et la promotion digitale des artistes tchadiens et intervient aussi dans la création des bases de données, afin de permettre aux jeunes musiciens de disposer de la musique tchadienne des années antérieures (depuis 1960) et l’exploiter pour enrichir le répertoire et l’identité musicale tchadienne. Dernière née des maisons de production (décembre 2019) au Tchad,  SaTchaProd music.com existe depuis 2014 du côté d’Abidjan (Côte d’Ivoire). Elle regroupe  en son sein l’ingénieur de son Iviano DJ, Tony Ives et le chantre Ramadji. La maison a produit en audio et visuel, plusieurs artistes de la place et aussi ceux d’ailleurs. Actuellement, elle travaille sur une application mobile, qui sera lancée d’ici la fin de l’année 2020 ou au début 2021, pour permettre de vendre la musique tchadienne, via mobile money et disposer d’un onglet musique d’ailleurs pour la consommation du public. Bien que la structure laisse ouverte ses portes aux jeunes artistes, beaucoup ne finissent pas ce qu’ils commencent, malheureusement. Djérabé Ndigngar exhorte les jeunes qui veulent bien faire une carrière musicale de se battre et prendre au sérieux leur travail. Il y va de la crédibilité de l’art et de soi.

Modeh Boy Trésor