Sorti d’une audience accordée par le président de la République le 27 décembre 2019, c’est un bureau exécutif du Syndicat national des enseignants et chercheurs du supérieur (Synecs) aux anges qui a réuni sa base le 14 janvier 2020 pour lui annoncer de bonnes choses, rares sous nos cieux.
“L’objet de la rencontre est de rendre compte de l’audience que le bureau du Synecs a eue avec le chef de l’Etat le 27 décembre 2019 et d’expliquer à la base certains points du protocole d’accord signé. Le Synecs a posé le problème de la Plateforme syndicale revendicative des enseignants et chercheurs. Les points abordés sont les primes et indemnités, la formation des formateurs, le statut autonome des enseignants et chercheurs, la couverture sanitaire universelle pour les enseignants et chercheurs, etc.”, introduit Jérémie Guirayo, président du Synecs.
Sur la formation des formateurs, les 4 milliards de francs CFA octroyés avant par le président de la République de manière triennale comme bourse de formation des formateurs ont permis à certains enseignants d’évoluer dans leurs grades, certains sont passés au Cames et d’autres ont obtenu leur doctorat et autres. Les enseignants et chercheurs du supérieur en sont arrivés au terme de ces fonds. “Nous avons donc reposé le problème au chef de l’Etat puisque les deux écoles doctorales qui viennent d’ouvrir ont besoin des enseignants de rang magistral. Il a été très réceptif à la question de la formation des formateurs. Il nous a donné une somme de 4 milliards pour la bourse de formation des formateurs. Le problème qui va se poser est celui de mettre sur pied une commission qui va essayer d’étudier les dossiers des enseignants et chercheurs qui seront dans le besoin”, annonce le président du Synecs.
Construction du siège du Synecs
Sur cette question, Jérémie Guirayo estime que l’actuel siège du Synecs est très caché. Il informe que lors de cette audience, le président de la République a instruit ses services et le ministère de l’Enseignement supérieur par le biais du rectorat à proposer un site d’une superficie de 3 000 m² à côté du Campus de Toukra. “D’ici peu, nous allons procéder à la réception de ce site et dans les prochains jours voir les modalités de la construction”, rapporte-t-il.
En ce qui concerne la couverture sanitaire universelle, puisque c’est un problème au niveau national, l’on attend que le ministère de la Santé publique puisse activer et permettre, du côté de l’enseignement supérieur “aux enseignants qui sont presque malades de pouvoir se soigner”.
Et pour leur statut autonome, le projet se trouve à l’Assemblée nationale qui doit l’adopter.
En plus de ces satisfactions, le président du Synecs mentionne qu’ils ont reçu du chef de l’Etat “un petit appui qui nous a permis de doter le Synecs d’une petite voiture”.
A tout cela, s’ajoutent les promesses contenues dans le protocole d’accord du 9 janvier 2020 signé entre le gouvernement et les partenaires sociaux.
“Nous pouvons dire que nous sommes sortis satisfaits de la rencontre avec le chef de l’Etat. Les points de revendications sectorielles que nous avons menées et qui nous ont conduits à la rencontre avec le chef de l’Etat ont été satisfaits à plus de 50%”, se félicite Jérémie Guirayo.
A la question de savoir qu’en cas de non-respect du protocole d’accord, que va faire le Synecs, le président se dit rassuré. “Les 35% sont en application. Je crois qu’au niveau de la solde, il y a quelque chose qui est en train d’être fait et hier (16 janvier) on a saisi notre ministère pour une note de service. A la fin de l’heure, la note de service a été signée par le secrétaire général du ministère et les primes et les indemnités doivent automatiquement être versées au mois de janvier. Donc, c’est déjà l’application du protocole au niveau de l’enseignement supérieur”, souligne-t-il.
Au cours de cette audience accordée par le président de la République, la question des enseignants contractuels n’a pas été occultée. Jérémie Guirayo informe que le reversement des enseignants contractuels a été relancé. “Le président de la République a instruit son secrétariat à propos, et les dossiers de nos camarades contractuels ont été transmis le lendemain (28 décembre) à la Fonction publique”, confie le président du Synecs qui éclaire l’opinion du soutien du Synecs à ses contractuels. Pendant un moment, le climat s’est assombri entre les enseignants permanents du Synecs et leurs camarades contractuels. Mais depuis que le Synecs a eu des rencontres avec le collectif des enseignants contractuels et vacataires, la relation entre les deux corporations est redevenue collégiale. C’est d’ailleurs ce qui a “permis de décanter la situation des contractuels et à motiver le président de la République à instruire les institutions de l’enseignement supérieur d’éponger les arriérés des vacataires”, relève le président du Synecs. Pour cela, conclut-il, si cela dépend des enseignants et chercheurs du supérieur, les étudiants doivent être tranquilles car s’il y a problème, ce sera beaucoup plus du côté des étudiants qui ont une batterie de difficultés.
Nadjidoumdé D. Florent
Déby promet leurs dus aux fonctionnaires
Pour mettre terme aux interminables négociations gouvernement/syndicalistes et à la grève, le président de la République a décidé d’accorder aux agents de l’Etat leurs droits acquis amputés depuis 2016.
La kyrielle de lancinantes négociations entamées par le Haut comité technique tripartite (syndicats-gouvernement-comité national de dialogue social) vers fin 2019 en vue de résorber la crise, a fini par devenir lassante. Les représentants du gouvernement à ces rencontres qui ne disposent que d’un pouvoir de décision limité, ont commencé par bégayer devant leurs partenaires sociaux. Ils ne leur faisaient que de maigres propositions allant dans le sens du dilatoire. Une stagnation de négociation s’en est observée, ce qui a poussé la Plateforme syndicale revendicative à reprendre du poil de la bête. Une grève perlée a été lancée, le 7 janvier 2020. Pour les grévistes, leur protestation devrait s’accompagner des actions pacifiques (marches, sit-in et autres) pour obliger le gouvernement à entendre raison.
Mais constatant qu’il a déjà poussé les partenaires sociaux, déterminés à percevoir l’intégralité de leur salaire amputé, à leur dernier retranchement, le président Déby Itno a finalement cédé. Le 7 janvier 2020, au cours d’une ultime rencontre à la présidence de la République avec les syndicalistes qu’il a dirigée lui-même, le chef de l’Etat concède à la proposition des agents du secteur public sur leurs Augmentations générales et spécifiques (Ags). “Pour les Ags, vous avez demandé 20% en janvier et 15% en juillet 2020 (…). Je vous les donne”. Pour les primes et indemnités, au lieu de 25% en janvier 2020 et 25% en janvier 2021, comme le veulent les syndicalistes, Déby Itno entend plutôt débourser 15% et 20%, respectivement en janvier et en juillet 2020. Les 15% restants seront clôturés en janvier 2021. La proposition du chef est acceptée.
Le 9 janvier 2020, un protocole d’accord est paraphé entre le gouvernement et ses partenaires sociaux. Ses clauses prennent en compte les propositions du président Déby et promettent de lever, après évaluation, le gel des effets financiers des avancements et reclassements pour compter de janvier 2020. Et les économies réalisées grâce à l’assainissement du fichier de la solde et à l’audit des diplômes seront affectées au payement partiel des frais de transport (2016-2019). Pour le Haut comité technique tripartite, les économies réalisées sur l’audit des diplômes et sur l’assainissement du fichier de la solde s’élèvent à près de 9 milliards de francs CFA. Sur ce pactole que visent les syndicalistes pour se faire rembourser leurs dus amputés, le gouvernement entend d’abord vérifier avant d’agir. Passée cette quinzaine de janvier où naguère les états de paiement sont déjà apprêtés au service de la Solde, le cœur des agents de l’Etat ne cesse de battre la chamade. Vivement attendu, le salaire de fin janvier sera la seule assurance des syndicalistes, à la seule condition qu’ils y trouvent ce que leur a proposé Déby Itno.
Au Haut comité technique tripartite, le chef de l’Etat demande de mettre en place une équipe pour préparer un pacte social afin de garantir une paix durable dans quarante-cinq jours à compter de la date de signature du protocole d’accord. Autrement dit, le président de la République met les béquilles, pour ne plus se voir surpris par un éventuel débrayage des syndicalistes. “Chat échaudé craint l’eau froid”, sachant que le gouvernement n’a pas respecté le protocole d’accord du 26 octobre 2018. Aussi, les syndicalistes ont-ils simplement suspendu leur grève, en attendant la conclusion d’un pacte social. Mais avant de signer ce pacte social, les militants de la Plateforme syndicale revendicative, selon leur porte-parole Barka Michel, vont également exiger du gouvernement le remboursement des salaires coupés depuis 2016, la représentativité syndicale et le respect de la liberté syndicale. Ils vont également exiger la révision de la loi 32 qui n’accorde que trois jours de grève payés aux agents du secteur public. Les syndicalistes ont déjà attaqué ladite loi devant le Bureau international du travail (Bit).
Lanka Daba Armel, stagiaire