Le ras-le-viol

Le 21 février, le corps sans vie d’une jeune fille, la vingtaine, a été découvert devant une habitation au quartier Abena, dans le 7ème arrondissement de N’Djaména. Elle a été violée, tuée et abandonnée là. Une semaine plus tôt, une sexagénaire, qui partait à l’église au petit matin, a été également violée et assassinée. Si les bourreaux de dame Mopi ont été appréhendés par la police et confiés à la justice, ceux de la jeune anonyme courent toujours.

Tous ces crimes qui se répètent en ce mois de février sont la face visible d’un iceberg plus grand. Chaque jour, des femmes se font violer dans nos villes et campagnes, mais personne n’en parle. Demain, c’est mars, le mois de la femme. Au lieu de verser dans des folklores, la Senafet 2020 (Semaine nationale de la femme tchadienne) vient de trouver son thème: “Tous contre le viol!” Que toutes les femmes et tous les hommes sortent et crient leur ras-le-viol! Tous, mobilisons-nous contre ces féminicides immondes!

Car les violeurs, ce sont les hommes, misogynes, phallocrates et sadiques de ce pays qui enjoignent aux femmes de se faire petites et silencieuses, d’être invisibles pour leur laisser la place. Le violeur, c’est aussi la société tchadienne qui a créé un tabou autour du viol et préfère rester dans le déni de la réalité. Le violeur, c’est également la police, les juges, l’Etat, tous incapables de protéger la femme, de punir de manière exemplaire les violeurs et d’endiguer une insécurité de plus en plus grandissante. Que dit le président Déby face à la montée des féminicides et de l’insécurité en général? Que dit-il aux millions de femmes tchadiennes qui ont aujourd’hui peur de sortir sans se faire violer et tuer?

Hier Zouhoura; aujourd’hui la maman Mopi et cette jeune anonyme d’Abena; demain, ce sera une autre fille, épouse, mère ou grand-mère. Indignons-nous tous et exigeons des solutions radicales pour arrêter ce fléau!

Il faut aider les femmes à se libérer du silence, en créant des structures d’accueil, d’écoute, d’accompagnement en justice et de prise en charge. Femmes victimes du viol, brisez les murs du mutisme, de la honte et de la culpabilité dans lesquels vous vous enfermez à tort! Sortez et criez vos souffrances, votre colère, votre peur! Car votre silence donne la victoire à votre bourreau, ne le laissez pas recommencer sur une autre!

Il convient également de mettre en place des campagnes de sensibilisation et de prévention, des programmes à l’école pour éduquer nos enfants au respect de l’autre et surtout de la femme. A la maison, éduquons aussi nos garçons à considérer leurs sœurs et la sœur du voisin comme leurs égales, non pas comme des êtres inférieurs.

Il faut en finir avec le “mara sakhit”, ce stéréotype qui fait de “la femme un simple objet”, notamment un objet sexuel dont l’homme peut en user et abuser à sa guise! Il est inconcevable que de nombreuses personnes ne considèrent pas que les faits constituent un viol si la victime était ivre, si elle portait une tenue légère ou si elle ne s’est pas physiquement débattue. Un rapport sexuel sans consentement est un viol, point final! Et un viol doublé d’un assassinat est le pire des crimes! Il faut en finir avec la culture du viol!

La Rédaction