Le rétropédalage du Comité de crise du Set

Par un communiqué publié le 5 mars 2024, le Comité de crise du Set sursoit à sa grève d’avertissement prévue du 6 au 12 mars 2024 pour une durée de deux semaines.

“Suite aux réunions en fin de journée du mardi 5 mars 2024 avec les autorités, le Comité de crise du Set annule la grève qu’il a annoncée à commencer à partir du 6 mars, pour une durée de deux semaines. Ceci, afin de permettre au gouvernement de concrétiser les promesses faites aux enseignants”, peut-on lire dans le communiqué.

Mais à l’analyse de la lutte entamée le Comité de crise, un fin observateur de la chose éducative estime que le président du Comité de crise, Djimoudouel Faustin et sa suite ont été pris en sandwich. Anguille sous roche ? “Je viens avec pincement au cœur vous faire la lumière sur notre point de presse du samedi dernier (Ndlr : 2 mars 2024). En effet, nous avions dit que si rien n’est fait, nous partirons en grève d’avertissement d’une semaine. Je voudrais vous dire que depuis le matin jusqu’à 16 h, nous avons été saisis par la haute autorité du pays, et par notre ministère de tutelle, concernant cette grève que nous voulons engager à partir de mercredi 6 mars 2024. Nous avons discuté sur certains points qui tardent d’être exécutés à cause de la lenteur administrative”, informe ses soutiens, le président du Comité de crise du Set.

 

Rétropédalage

“Nous sommes devant une situation très difficile, qu’il s’agisse surtout de la sécurité, nous n’avons pas de choix”, argumente Djimoudouel Faustin sa renonciation d’appeler à la grève. Il rappelle que le dossier du Comité de crise a connu une interférence politique et qu’en allant en grève, cela aura certainement de répercussions sur leur ordonnance relative à l’organisation en vue du congrès dont le retard est l’une des causes à la base de tous les soubresauts qui secoue aujourd’hui le syndicat du charismatique Ngarmadjal Gami dont le mutisme face à cette situation ne cesse d’étonner. Pour rappel, le Comité de crise a introduit une requête aux fins d’obtenir une ordonnance pour l’organisation du congrès qui mettra en place un “bureau national légal”, qui prendra le relais pour défendre les intérêts matériels et moraux des enseignants. Mais un autre observateur de s’interroger, sur quels base et textes légaux le Comité de crise organisera-t-il son “prétendu congrès étant donné que les membres du comité de crise ne sont pas de militants du Syndicat des enseignants du Tchad bon teint, pour n’y avoir pas milité raisonnablement et de surcroît, pourquoi n’en veulent-ils qu’au bureau légalement élu par le Congrès de l’organisation, mais n’entendent pas créer leur propre syndicat s’ils ne sont pas satisfaits de la gestion du syndicat existant”. Pour lui, le comité de crise, mué tantôt en bureau provisoire du Set, cache d’autres velléités qui ne se résument qu’en une bataille de bataille de leadership. “C’est la tête du Set qui les intéresse. Ils veulent simplement éjecter l’actuel secrétaire général du Set, Ngartoide Blaise, que le Dialogue national inclusif et souverain a envoyé au Conseil national de transition. C’est une pure jalousie sans fondement syndical”, tranche l’observateur.

“Il y a la question sécuritaire dans ce pays qui vient de commencer. Cette situation a été, à plusieurs reprises, évoquée lors de nos réunions. Est-ce que nous allons partir en grève, sachant que les autres grèves ne sont pas considérées, mais la grève du Comité de crise est une grève qui sera ressentie sur l’ensemble du territoire, et compte tenu de l’aspect événementiel qui vient de passer ces derniers jours, on nous a vivement conseillé de surseoir à la grève prévue le 6 mars. Sinon, nous sommes en train de risquer beaucoup de choses”, justifie Djimoudouel Faustin. Il mentionne que “compte tenu de ce conseil, et surtout de l’engagement que le gouvernement vient de prendre, nous, au niveau de la base, sur 51 personnes, unanimement, avons décidé de surseoir à la grève lancée du 6 au 12 mars 2024 et de continuer les cours. Ceci, afin d’accorder au gouvernement une semaine ou dix jours. Cela n’est pas difficile”.

En effet, si les raisons qui ont fait surseoir à cette grève sont d’ordre sécuritaire, il faut tout de même noter que le Comité de crise du Set se trouve entre le marteau et l’enclume. Entre poursuivre les pourparlers avec le gouvernement et aller en grève, le Comité de crise semble faire un rétropédalage. Dans l’un ou l’autre cas, aucune solution n’est possible pour l’instant. “Chers camarades, nous comprenons votre difficulté et le fait que le gouvernement est en train de nous tromper, ou mieux, en train de nous retarder tous. Nous sommes devant un dilemme. D’un côté, prendre en compte la dimension sécuritaire, et de l’autre, la revendication sociale. En ce sens, nous avons préféré nous accorder avec le gouvernement pour permettre que la crise sécuritaire soit résolue, qu’il y ait accalmie pour nous éviter le pire”.

 

Au-delà de la faiblesse, un cri à la confiance

Pour mettre la base en confiance, Djimoudouel Faustin précise que “ce n’est pas que le Comité de crise est en train de vous tromper ou faire le jeu du gouvernement, mais nous sommes en train de nous protéger nous tous et éviter le pire. En fait, nous n’avons pas peur. Ce qui était arrivé était très difficile, mais nous avons continué, nous sommes allés jusqu’au bout”. Selon le Comité de crise du Set, compte tenu des circonstances dans lesquelles se trouve le Tchad, il ne sert à rien de créer d’autres situations pour mettre de l’huile sur le feu. “Ce n’est pas une fuite en avant, mais bien plus la sagesse qui voudrait que nous puissions décider ainsi”, rassure Faustin qui appelle les membres du Comité de crise de continuer avec les cours en attendant que la situation soit arrangée, et qu’il y ait accalmie avant de revenir à la charge.

“Vous allez dire que le comité a failli, ou qu’il n’a rien fait. Nous sommes devant une situation”, dit Faustin avant d’expliquer que son équipe négociatrice a discuté avec la haute hiérarchie et qu’il n’est question ni de manque de volonté, ni de mauvaise foi, mais plutôt de la lenteur administrative.

Ainsi, tout en demandant d’un côté à la base de prendre son mal en patience, et vaquer à ses occupations tant administratives que pédagogiques dans le calme, le président du comité de crise, exige au gouvernement d’honorer ses engagements dans la concrétisation des promesses faites.

Toïdé Samson