L’insuffisance rénale : Pas de traitement définitif au Tchad

Selon la prévalence hospitalière, 10% des patients souffrent de l’insuffisance rénale au Tchad. Mais ils ne reçoivent que de traitement palliatif et non définitif faute des appareils sophistiqués. Dr Haoua Youssouf Seid, néphrologue au Centre hospitalier universitaire la référence nationale (Chu-Rn) de N’Djaména donne plus d’explication.

Qu’est-ce qu’une insuffisance rénale et quels sont ses signes et symptômes ?

L’insuffisance rénale c’est l’incapacité de rein à effectuer normalement sa fonction (éliminer les déchets et équilibrer les liquides de l’organisme). Il y a deux types de l’insuffisance rénale à savoir l’insuffisance rénale aiguë et l’insuffisance rénale chronique. Le premier est réversible, c’est-à-dire le rein s’arrête de fonctionner à un moment et reprend après sa fonction normale. Tandis que le deuxième est irréversible, c’est-à-dire le perd sa fonction au cours de temps. L’insuffisance rénale a peu de signes et de symptômes mais parmi quelques-uns fréquents, il y a la diminution de quantité des urines, c’est-à-dire la personne atteinte se lève un matin et n’arrive pas à uriner. Il y a aussi le gonflement des pieds et des joues (augmentation des liquides dans l’organisme) appelé en terme médical les œdèmes. L’hypertension artérielle, l’émission du sang dans les urines sont également les signes d’une insuffisance rénale. Et lorsque le rein ne fonctionne plus, il y aura l’accumulation des déchets dans le sang et il y aura des symptômes appelés “l’urée” (déchets azotés) : on parle de l’insuffisance rénale terminale. Dans cette phase, le patient éprouve comme symptômes, de fatigue, des nausées, de vomissement, l’insomnie, etc.

Causes et conséquences de l’insuffisance rénale

Au Tchad, la première cause d’une insuffisance c’est d’abord l’hypertension artérielle. Viennent s’ajouter le diabète, la goutte, la consommation abusive des médicaments tels que les anti-inflammatoires stéroïdiens, les antirétroviraux ainsi que certains anticancéreux, la phytothérapie (consommation abusive des plantes, des feuilles des plantes, des écorces et les racines). Les maladies urologiques et infectieuses telles que le paludisme chronique non traité, le VIH, les Hépatites B et C, la syphilis et la tuberculose peuvent aussi causer de l’insuffisance rénale. Et ce n’est pas tout : il y a les maladies héréditaires, l’insuffisance cardiaque, etc. qui peuvent tout de même provoquer une insuffisance rénale.

Comme conséquences, toute insuffisance rénale non traitée peut conduire à la mort de patient.

L’insuffisance rénale se différencie-t-elle des autres maladies rénales ?

Non ! Toutes maladies qui touchent les reins peuvent évoluer vers une insuffisance rénale si on ne les traite pas. C’est dire qu’on ne peut pas dire que l’insuffisance rénale est différente des maladies qui touchent les reins parce que c’est la conséquence de celles-ci qui vont causer celle-là. A ne pas confondre avec les lombalgiques qui ne sont que des douleurs au niveau de la colonne vertébrale dues aux travaux durs ou au port des poids lourds.

Il faut dire que parmi les types de l’insuffisance rénale, il n’y a pas le plus fréquent ou virulent, car cela dépend de leur gravité. Mais en terme de diagnostic, c’est l’insuffisance rénale chronique qui est le plus diagnostiqué parce qu’au Tchad, les gens attendent à ce que le mal soit profond avant de se rendre à l’hôpital.

Au Tchad, avez-vous enregistré de nombreuses personnes atteintes d’insuffisance rénale ?

Au Tchad, on n’a pas de statistique exacte connue de cette maladie parce qu’il n’y a pas une étude faite sur toute la population tchadienne. Toutefois, il y a une prévalence hospitalière qui renseigne que 10% de patients souffrent de l’insuffisance rénale aiguë et cela reflète également la prévalence mondiale. Mais en termes de genre, ce sont les hommes qui sont les plus touchés.

Le Tchad dispose-t-il d’un plateau technique approprié pour le traitement de l’insuffisance rénale ?

Pour tout le Tchad, il n’y a que deux plateaux (à l’Hôpital central et la Renaissance) qui traitent cette maladie rénale. Et comme il en existe plusieurs types de traitement de suppléance, il manque certaines machines pour quelques-uns. C’est le cas de dialyse péritonéale, l’hémodiaflitration (autre forme de filtration de sang en grande quantité), la transplantation rénale (prendre l’organe chez un autre patient et donner à celui qui souffre de l’insuffisance rénale), etc. Pour tout dire, tous les patients qui souffrent de l’insuffisance rénale au Tchad ne reçoivent que de traitement palliatif ou temporaire et non définitif. Même ce traitement temporaire est insuffisant pour toute la population tchadienne, d’autant plus que le plateau de l’hôpital la Renaissance n’est pas accessible à tous. Il manque aussi des spécialistes dans ce domaine puisqu’à ce jour, il n’y a que cinq néphrologues pour tout le Tchad et c’est insuffisant. Pour ce qui est du traitement, les personnes atteintes de l’insuffisance rénale aiguë reçoivent un bref traitement (deux à trois séance d’épuration) et une fois que leurs reins commencent à fonctionner, on arrête le traitement et on les libère des urgences. Par contre ceux qui souffrent de l’insuffisance rénale chronique au Tchad comme on n’a pas la transplantation rénale pouvant les traiter définitivement, on leur donne un traitement à vie avec l’hémodialyse conventionnelle (trois séances de dialyse par semaine) coûtant entre 125 000 à 200 000 francs CFA par séance soit à peu près 600 000 francs par semaine. Heureusement que la dialyse au Tchad est gratuite, c’est le gouvernement par le biais du ministère de la Santé publique et de la prévention qui paye cette somme d’argent et les patients n’achètent que des accessoires pour la pose de dialyse.

 

Les précautions à prendre

Avant tout c’est le mode de vie. Il faut manger moins gras, moins salé, moins sucré pour éviter les maladies telles que l’hypertension artérielle, le diabète, la goutte, etc. puisqu’elles sont les causes de l’insuffisance rénale. Éviter de prendre abusivement les anti-inflammatoires non stéroïdiens qu’on appelle généralement les Ibuprofène, Diclo, drogue, etc. surtout les jeunes. Il faut aussi éviter la phytothérapie et traiter tôt, les maladies citées ci-haut qui peuvent causer l’insuffisance rénale.

Que le gouvernement agisse promptement sur la prévention des maladies chroniques qui peuvent déclencher l’insuffisance rénale ; installer les appareils manquants dans les plateaux des services de néphrologie afin de traiter définitivement les personnes malades sur place. De former aussi plus des néphrologues pour une bonne prise en charge des patients, car le nombre actuel des spécialistes est insuffisant.

Propos recueillis par Nadjimbaye Dana Jonathan     

               

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