Très peu de femmes dans l’enseignement supérieur

 

Un colloque scientifique autour du thème “Femmes et enseignements supérieur au Tchad : acquis et perspectives scientifiques” a été organisé les 6 et 7 février 2024 au Centre national de la recherche pour le développement (Cnrd).

Placé sous le patronage du ministère de l’Enseignement supérieur de la recherche et de l’innovation, le colloque a permis un grand nombre de communications, ainsi qu’à informer les participants sur les statistiques des femmes dans l’enseignement supérieur, parmi lesquelles on compte 8 femmes sur les 47 postulants, qui ont soutenu fin janvier 2023, les premières thèses de doctorat au Tchad, au sein des deux écoles doctorales : “Sciences, techniques et environnement”, et “Lettres, sciences humaines et sociales”.

Il a été question de réfléchir à la stratégie pour renforcer l’intégration des femmes dans l’enseignement supérieur, en considérant les missions assignées à l’Association des femmes et enseignantes chercheures du supérieur au Tchad (Afecst), dans la valorisation et la promotion des Femmes enseignantes et chercheures du supérieur au Tchad. A l’issue du colloque, des recommandations issues des deux jours de travaux, qui illustrent les conclusions principales de l’expertise scientifique collective recherchée, sur la base d’éléments scientifiques fournis, étayés et vérifiés, sont élaborées.

A l’Ambassade de France au Tchad, le colloque recommande de renouveler le fonds de solidarité innovant afin de poursuivre les activités de recherche des femmes du supérieur au Tchad. Au ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche scientifique d’accompagner financièrement et techniquement la politique genre dans l’Enseignement supérieur et de la recherche scientifique à travers l’Observatoire genre (Og), et vulgariser l’Og dans les différentes institutions de l’Enseignement supérieur en mettant en place les cellules genres.

De quoi réjouir Eric Gérard l’ambassadeur de France au Tchad, pour qui ce colloque est l’aboutissement du Projet “Fonds de solidarité pour les projets innovants (Fspi) genre et Enseignement supérieur”, financé par son ambassade. Le diplomate français profite l’occasion pour annoncer que “c’est un projet concret avec deux composantes. Il vise à l’augmentation du nombre de femmes étudiantes, enseignantes et chercheures mais également à participer au changement de regard que la société porte sur l’éducation des filles, en complémentarité de certaines initiatives nationales conduites dans le domaines (…) De deux, il porte sur le renforcement des capacités de l’enseignement supérieur tchadien dans le développement de la coopération inter universitaire entre les deux pays, et je connais les souhaits de coopération accrue dans ce domaine (…) Nous comptons poursuivre cet effort, même l’amplifier en 2024”, projette-t-il. Les défis pour renforcer la place et l’implication des femmes dans l’enseignement supérieur sont nombreux, tant pour les étudiantes, les enseignantes, les chercheures, et pour les responsables de formation et d’établissement d’enseignement supérieur, conclut Éric Gérard.

La mise sur pied d’un comité de suivi de ces recommandations incombe à l’Association des Femmes enseignantes chercheures du supérieur au Tchad.

 

Du chemin reste à faire à l’enseignement supérieur

La secrétaire d’état du ministère de l’Enseignement supérieur, Souate Djibrine Brahim, qui a ouvert les travaux, a signifié que son département depuis quelques mois, accorde une attention particulière à cette question de la prise en compte de ses collègues femmes, depuis l’accompagnement des jeunes femmes dans les cycles supérieurs de l’enseignement, leur intégration en tant qu’enseignantes chercheures, au sein des universités et établissements d’enseignement supérieur et leur accès aux postes de responsabilité des établissements. L’intention d’appliquer le quota de 30% accordé par la Loi dans les recrutements au poste de responsabilité y est. Mais elle constate aujourd’hui qu’“Il nous est difficile à notre niveau de pouvoir atteindre ce chiffre, puisque le nombre de femmes ayant pu atteindre des niveaux de master et doctorat reste très faible ; nous déplorons que seulement trois femmes soient aujourd’hui au grade de Maîtres de conférences, 13 Maîtres assistants et 40 Assistantes d’université au Tchad”. C’est pourquoi, le département a initié des cellules de réflexion sur des stratégies relatives à la question genre et sa prise en compte en son sein, relève-t-elle.

 

Des facteurs entravent et freinent les femmes

La présidente du comité d’organisation, Mme Fatimé Pamdégué renchérit que les femmes sont effectivement rares dans l’enseignement supérieur. Un avis partagé par la présidente du comité scientifique, qui dénombre que sur un total de 2 700 enseignants chercheurs, il n’y a que 294 femmes (environ 11% de l’effectif total). “Si on considère la répartition par grade, l’écart est criard. En effet, statistiquement, il n’y a que 3,4% d’enseignantes chercheures de rang magistral parmi l’ensemble des professeurs titulaires ou maîtres de conférences habilités à diriger les recherches ; au grade de Maître-assistant, les femmes ne représentent que 3,4% et au grade d’assistante d’université, elles représentent environ 4%. L’appui aux femmes dans l’enseignement supérieur est devenu ainsi un enjeu critique dans un Tchad en transition”, observe-t-elle. Mme Hélène Lambatim, docteure en droit, enseignante chercheure à l’université, dans la leçon inaugurale qu’elle a présentée, a expliqué les causes et facteurs qui freinent les jeunes femmes à pouvoir suivre une formation dans l’enseignement supérieur et la recherche, malgré la volonté d’y remédier.

Roy Moussa