Manayal Bonheur

A qui la charge des orphelins et veuves de Bonheur?

Désormais, les trois très petits enfants de Manayal Natiga Malick ne verront plus leur père. Papa ne leur présentera plus jamais des beignets le matin, non plus donner de quoi à leurs mamans désormais veuves, pour leur préparer à manger. Qui donc succédera à Bonheur dans cette lourde tâche?

Les enfants de Bonheur apprendront désormais, à vivre sans le concours de leur père, fauché à fleur d’âge par cette méchanceté humaine du 4 novembre 2019. Une mort cruelle qui croise le chemin de Mateyan Manayal Bonheur, en pleine circulation au niveau du Centre des jeunes Don Bosco de Chagoua, dans le 7ème arrondissement de la ville de N’Djaména. Ses enfants ont respectivement quatre ans, deux ans et deux semaines. La réaction aussi creuse qu’insensible teintée de mensonge du président de l’Assemblée nationale a suscité chez les parents du défunt une colère. Le 8 novembre, le père de Bonheur, Manayal Natiga Malick sort de son silence et déclare qu’il n’entend pas enterrer son fils tant que les autorités de l’Assemblée nationale ne signent pas un engagement de prise en charge de ses petits-fils jusqu’à leur majorité. Car, soutient-il, d’ici cinq à six ans, il ira à la retraite, par conséquent, il ne pourra pas assurer leur charge.

Mais le président de l’Assemblée nationale, Haroun Kabadi ne se reproche de rien. “Il n’y a rien à se reprocher. C’est un incident qui est arrivé. On va essayer de gérer comme on le peut”, lâche-t-il deux jours après l’incident, le 6 novembre, à ses collègues députés en plénière. Au Palais de la démocratie, il informe ses collègues de la situation qui a déjà fait trop de bruit.

“Un véhicule a essayé de s’introduire dans l’escorte à deux reprises et un des agents sécuritaires a dû tirer en l’air. Malheureusement, la balle a dû heurter un poteau de la Sne et revient frapper un passant. Il s’agit d’un motocycliste qui était avec sa sœur. La balle étant tirée, par ricochet, elle a dû atteindre le jeune. Il a été transféré à l’hôpital où il est mort suite de ses blessures”.

Haroun Kabadi demande à ses collègues d’être vigilants. “Sur la toile, il y a tellement des choses qui se disent. Mais ce n’est pas ça qui m’a amené à vous informer. C’est qu’il y a également des perturbations. Certains groupes veulent faire des manifestations. Je voudrais que les députés soient très attentifs lors de leurs déplacements en ville pour essayer d’éviter ce genre de rencontre”, déclare-t-il. Une déclaration qui a davantage suscité des réactions dans les médias traditionnels et sur les réseaux sociaux.

A vouloir assurer la sécurité du président de l’Assemblée nationale dans une circulation fut-elle dense à de pareilles heures (17 h-18 h) où chacun se presse de rentrer chez lui, la protection d’Haroun Kabadi a fait usage de l’arme à feu, deux balles sur le jeune Bonheur qui transportait ce soir-là une cliente sur sa mototaxi. Rentré au pays avec une maîtrise en droit, Mateyan Manayal Bonheur fait face à une situation sociale qui l’oblige à exercer cette activité de mototaxi pour subvenir à ses besoins et à ceux de sa famille avec dignité.  Mateyan Manayal Bonheur, ce nom qui évoque l’espoir de vivre, reflète bien évidemment le genre de personne qu’est le défunt. Car il ne croise pas les bras comme c’est le cas de nombreux jeunes diplômés chômeurs de notre société. Dans un pays normal, un tel diplômé ne devrait pas faire de la mototaxi pour gagner sa vie. Mais il a accepté cette condition en se battant comme un grand garçon. Là encore, il sera victime d’une cruauté des agents censés lui assurer la sécurité pour exercer son activité de mototaxi. Il est abattu comme un chien par la protection du président de l’Assemblée nationale. Son tort c’est d’être en même temps sur la voie construite grâce à l’argent des contribuables tchadiens.

Nadjidoumdé D. Florent.