La sociologie pour promouvoir le vivre ensemble

Le 20 novembre 2019, un arrêté du ministre de l’Education nationale et de la promotion civique, introduit la matière sociologie dans le programme des classes première et terminale de l’enseignement secondaire général. L’objectif de cette innovation est d’inculquer aux élèves, les notions basiques de la matière pour la culture du vivre ensemble.

L’introduction de cette nouvelle matière doit être effective dès la rentrée scolaire 2020-2021 dans tous les lycées d’enseignement secondaire général du Tchad. A cet effet, une note circulaire du ministre datée du 21 septembre 2020, adressée aux délégués provinciaux de l’Education nationale et de la promotion civique, les instruit de rendre effective l’application de la décision dans leur circonscription respective dès la rentrée 2020-2021.

Ainsi, il leur est demandé d’élaborer l’emploi du temps de la rentrée scolaire en cours en intégrant la nouvelle matière. La note circulaire informe également des dispositions qui sont prises par la direction des ressources humaines du ministère de tutelle en vue d’affecter les enseignants de la matière sociologie dans les lycées. Une campagne d’information et de sensibilisation doit être faite auprès des parents d’élèves et toutes les sensibilités impliquées dans l’éducation, la formation et l’encadrement des élèves.

L’introduction de cette matière de sociologie est une innovation suggérée par la direction générale du Centre national des curricula (Cnc). Son insertion dans le programme scolaire tchadien a fait l’objet d’un atelier de réflexion au Cnc qui a regroupé des personnalités, des syndicats et des responsables des ministères de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation et celui de l’Education nationale et de la promotion civique. Il a été jugé utile d’intégrer la sociologie dans certaines classes, notamment en première et terminale. “Suite à cet atelier de réflexion, nous avons organisé d’autres ateliers pour voir qu’est-ce qui sera enseigné aux enfants. Nous avons mis en place un curricula depuis 2017, mais il n’y a pas encore de manuel de la classe de 1ère. Nous estimons que les enseignants sont à mesure de trouver dans les bibliothèques et Internet, des documents qui sont tracés dans ce curricula pour pouvoir enseigner”, explique le directeur général du Cnc, Dr Aboubakar Ali Koré. C’est son institution qui a soumis ce projet d’introduction de la sociologie comme matière à enseigner dans les classes de première et de terminale.

Le Dg du Cnc fait partie des responsables dans le secteur de l’Education qui justifient l’insertion de la sociologie dans le programme scolaire par un constat alarmant d’un manque de volonté de vivre ensemble, de l’unité nationale et l’intolérance qui s’observent dans les sociétés tchadiennes. “La sociologie est une science qui étudie les phénomènes sociaux et les relations humaines. Elle facilite la cohabitation, la tolérance, le vivre ensemble, etc. Et conduit les citoyens vers l’unité nationale.C’était bien notre proposition, notre choix. Les responsables politiques parlent de la cohabitation, de vivre ensemble, mais ce sont des choses verticales. Pourtant, nous cherchons des choses horizontales, qui doivent être gravées dans la mentalité des plus petits jusqu’à leur maturité. Et cela se passe par l’école et le curricula. On dit vaut mieux tard que jamais, donc il faut qu’on profite de cette science qui doit être intégrée dans nos curricula et surtout dans le 1er cycle pour voir en terme d’expérimentation ce que cela va donner comme fruit. Car, la sociologie aide des individus à se connaître et de ne pas avoir peur les uns et des autres. Telles sont les raisons qui nous ont poussé à insérer la sociologie dans le programme de l’école tchadienne”, justifie le Dg du Cnc. Alors si tel est le justificatif, “nous disons que l’enseignement de l’éducation civique ou de l’éducation à la citoyenneté est déjà suffisant, il en va de même de la philosophie et de certains thèmes traités en français. Il est donc difficile de cerner les motivation de cette réforme qui vient annoncer une fois de plus les dérives du système éducatif tchadien”, commente le pédagogue Djimrassem Thalès.

“Et normalement, cette rentrée-là, l’enseignement de la sociologie dans les deux dernières classes du secondaire doit commencer. Mais notre souci est sur le plan d’organisation et la formation des enseignants. Dès lors, nous avons dit que les enseignants de philosophie peuvent enseigner en attendant de trouver les enseignants de sociologie”, relève Aboubakar Ali Koré, ce qui constitue les difficultés qui peuvent empêcher l’effectivité de cette innovation du programme scolaire. Par ailleurs, le directeur du Cnc note qu’il y a des jeunes formés à la Faculté des sciences sociales et humaines de Toukra et dans d’autres facultés arabophones, qu’il faut recruter pour les déployer dans les lycées. Ils sont des milliers à être formés mais qui chôment pourtant ils sont très indispensables, suggère le Dg. Il fait observer que ces nombreux jeunes formés en sociologie sont abandonnés et deviennent des conducteurs de mototaxis parce que dans les écoles, il n’y a pas la matière sociologie à enseigner.

C’est une phase expérimentale qui n’est pas facile reconnaît le Dg du Cnc, même si la note circulaire du ministre de tutelle fait déjà mention des dispositions prises pour l’effectivité de l’enseignement de la sociologie.

Le Dg pense à cet effet que les sociologues et philosophes sont complémentaires. Donc, les enseignants de philosophie peuvent dispenser le cours de sociologie en attendant. Et ce n’est pas la sociologie en tant que matière, mais ce sont les idées  et des termes en sociologiques qu’il faut partager, inculquer dans la mentalité des enfants. Il existe des vocabulaires très importants qui cultivent le vivre ensemble entre nous les personnes, conclut-il.

Mais telle que relatée par son initiateur, l’introduction de cette nouvelle matière dans l’emploi du temps risque de poser de bouleversement. Va-t-on ajouter des heures au programme journalier des classes concernées ou bien soustraire du volume horaire ordinaire (5 heures par jour) déjà réparti pour introduire la sociologie? C’est toute la question.

NDF