Le Conor finit-il en queue de poisson ?

Le 25 octobre 2023, lors de l’Assemblée générale organisé par le Comité de normalisation (Conor) pour l’adoption des nouveaux textes, la présidente Me Jacqueline Moudeïna avait émis une préoccupation : “Etant entendu qu’il peut y avoir des cas de force majeure, il serait important que l’Assemblée donne le pouvoir au Conor de procéder à des réaménagements en cas de nécessité”, avait-elle insisté. Nous y voilà !

Elle avait insisté pour solliciter l’appui des délégués, parce que son mandat expire le 30 novembre 2023. Après cette date, le Conor ne pourra plus poser des actes. La réponse du berger à la bergère est venue de Jean-Jacques Dieng, le représentant de la Confédération africaine de football (Caf) : “C’est le conseil de la Fifa qui a fixé la date butoir au 30 novembre 2023, qui donne mandat au Conor et non l’Assemblée générale statutaire. Normalement, le délai pour organiser les élections est de 45 jours, comme prévu dans les statuts. Une disposition transitoire doit être intégrée dans les textes pour les élections de cette année 2023. Pour les futures élections dans 4 ans, le délai de 45 jours doit être observé”, a précisé et tranché Jean-Jacques Dieng. Une position partagée et soutenue par son collègue représentant de la Fifa.

Chronologie d’un blocus

Tous ces propos ont été tenus avec la ferme volonté d’arriver aux élections le 30 novembre 2023. Dès le lendemain 26 octobre, la présidente du Conor Me Jacqueline Moudéïna a rendu publique, par décision n°13, l’ouverture de candidatures au Conseil de la Ftfa. Y figurent dans la décision, les conditions à remplir pour être candidat, les dossiers à fournir, et la date de clôture du dépôt des dossiers, fixée au vendredi 10 novembre 2023 à 12 h. Les candidats ont jusqu’au 15 novembre pour compléter leur dossier. Le 20 novembre, c’est la publication des listes de candidature et le 30 novembre 2023, c’est l’organisation de l’Assemblée générale élective (Age), des membres du nouveau bureau exécutif du Conseil de la Ftfa. Le 10 novembre 2023, deux candidats têtes de liste, notamment Ibrahim Wang Laouna Foullah et Tahir Oley Hassan, ont déposé leur dossier et informé en même temps l’opinion. Le 20 octobre, comme prévu, le Conor a rendu public une des deux listes jugées conforme aux conditions requises, qui est celle de Foullah. Le 21 novembre 2023, le candidat recalé Tahir Oley Hassan, à travers un pont de presse, réagit en indiquant qu’il allait saisir les instances compétences pour rentrer dans ses droits. Le 22 novembre 2023, Foullah lance sa campagne, tandis que Tahir quant, lui, saisi le ministère en charge des sports et la justice à la même date. Le 23 novembre 2023, la présidente du Conor invite les instances sportives concernées par les élections à faire parvenir les noms de leur délégué respectif. Dans le même temps, un désaccord survient au sein du bureau du Conor, au point où la Fifa a décidé de suspendre le vice-président et lui a demandé de se tenir à l’écart du processus en cours.  Le 24 novembre, le ministre en charge des sports, Patalet Géo, répond à Oley que le ministère ne peut s’ingérer dans le processus électoral de la Ftfa en cours et l’exhorte par la même occasion à user des voies de recours prévues notamment à l’article 9 du Code électoral en vigueur. Le même 24 novembre, le président du tribunal de grande instance de N’Djaména délivre une ordonnance aux fins de suspension de la tenue de l’assemblée générale extraordinaire élective de la Ftfa. Le 28 novembre 2023, la Fifa réagit par rapport à l’ordonnance à travers un courrier, en rappelant toutes les démarches qui ont conduit à la mise en place du Conor, et que seul le Tribunal arbitral des sports (Tas) est le seul compétent qui règle les litiges en question de manière définitive (art 64 des statuts de la Ftfa). Tout en indiquant que chaque association membre de la Fifa jouit d’une indépendance et d’une autonomie à préserver de toute ingérence extérieure à la Fifa, qu’elle soit étatique ou autre.

Le 30 novembre 2023, tous les délégués sportifs conviés sont arrivés à l’hôtel dès 8h du matin pour constater l’interdiction d’accès de la salle par les gendarmes. Les rares informations qui ont circulées ont laissé comprendre que les délégations de la Fifa et de la Caf, arrivées pour superviser les élections, seraient tantôt au ministère de la Sécurité publique , de la justice, tantôt à la primature pour dénouer la situation. Ce statu quo a duré jusqu’à 22 h, lorsqu’il a été demandé aux journalistes de rentrer et que d’éventuelles communications leur parviendrait. L’on attend donc de voir quelle sera l’issue de cette énième crise qui enfonce davantage le football tchadien dans les profondeurs des abimes. Classé 179ᵉ au rang de la Fifa, le football tchadien occupe la 48ᵉ place sur 54 en Afrique. Les regards sont donc tournés vers la Fifa et la Caf. Wait and see !

                                                                                               Roy Moussa