Les architectes de l’enfer!

La si banale et subreptice question “POURQUOI” est sans doute la question la plus prépondérante de notre expérience existentielle. Car, que ce soit au niveau individuel ou collectif, elle arme la conscience de l’Homme à la racine à l’essence des choses plutôt que de l’égarer dans le dédale fluctuant des contingences. Dès lors, se refuser à se poser cette fondamentale question, procède au mieux d’une parfaite ignorance, au pire, cela revient à jouer du levier de l’hypocrisie pour esquiver les vrais problèmes et se retrancher derrière un questionnement de façade.

Depuis le honteux coup d’État perpétré dans le sillage de la tragique disparition du maréchal président, tout porte à croire que les nouveaux tenants du pouvoir restent soucieux de parachever la gouvernance cataclysmique du défunt despote. D’ailleurs, devrait-il en être autrement que ces faucons ne se rendent coupables de cette forfaiture ? Les mauvais génies se montrent prompts à applaudir une telle ignominie pour la bête et simple raison qu’en dehors des eaux troubles et boueuses de l’immortalité, de la roublardise et des hâbleries, il n’est point de salut pour eux. Héritage spécieux que cette culture de la déliquescence morale et humaine légué par le brave autocrate. La paix, la stabilité, la réconciliation nationale que tout le monde dans la sphère du pouvoir aime à scander comme autant de mantras sont-elles de simples préciosités de l’esprit que quiconque pourrait actualiser au gré d’incantations et de d’injonctions? Il est quelque chose d’authentiquement révoltant dans le comportement des hommes et des femmes qui nous gouvernent. L’on ne peut objectivement prêcher le pardon, l’unité, et dans les actes n’agir que pour assassiner ces précieuses valeurs. En effet, le pardon est un élan du cœur dont le répondant est le remords de l’offenseur; aussi regret ni remords de celui ou celle qui aurait causé torts à autrui, il n’y a pas de pardon qui vaille. En d’autres termes, la vraie réconciliation c’est celle des cœurs, non pas celle des laïus et autres logorrhées faussement émotifs, faussement patriotiques ou altruistes. Les discours filandreux dont nous nous fendons çà et là, la litanie des belles intentions dont nous nous abreuvons au quotidien, ne nous seront d’aucun secours quant à la refondation de notre société ; au contraire parce que cette hideuse comédie est un crachat cynique mépris sur le sort de celles et ceux qui souffrent l’humiliation dans leur chair, elle ne rajoutera que de la frustration à la frustration. À dire vrai, nos préoccupations sont on ne peut plus claires et simples. Hélas! Nous sommes gouvernés par des autruches qui enfoncent leurs têtes dans le sable de l’indifférence. Ils jouent délibérément les autistes pour éviter de répondre des responsabilités qui sont les leurs. Dès lors, quiconque s’autoriserait dans les conditions présentes à espérer un changement pour le meilleur, ne vaudrait ni plus ni moins qu’un doux rêveur promis à un réveil des plus cauchemardesques. En effet, au vu des hommes et des femmes aujourd’hui appelés à conduire à différents niveaux notre période transitoire, nous aurions tort de croire en la moindre promesse d’un futur reluisant. Rajoutons à cela les méthodes bancales, les mécanismes moribonds, les stratégies malhonnêtes déployées pour mener la transition et nous lirons à la perfection le portrait infernal de notre prochain devenir. Auraient-elles profité de ce moment décisif qui à nous s’offre pour expérimenter des recettes nouvelles que nos autorités nous eussent inspiré un brin d’optimisme. Hélas! Comme s’il n’y avait de citoyens que les éternels kleptocrates, les indécrottables gérontocrates. Ni les femmes ni les jeunes ne sont impliqués dans la conduite de ce tournant décisif, à moins d’être à un degré ou un autre liés au giron d’un obligé du système gouvernant. Quant aux hommes et femmes moralement probes; intellectuellement compétents, ils ne sont rien de moins que des pestiférés du régime en place, des ennemis à abattre. Sans être un cannibale fou, un optimiste obsédé, comment espérer que puisse éclore un État de droit, une nation dans des ruines irriguées entretenues?

Comme nous ne cesserons jamais de le marteler, la démocratie avant d’être une denrée politique est un principe idéologique, un idéal moral. Comme telle, elle ne sera jamais réalisable par des individus dont la moralité est non seulement en berne, mais littéralement morte. Les Hommes sont certes des êtres perfectibles; encore faut-il que leurs erreurs soient involontaires et que leur conscience soit habitée par le désir de s’améliorer. Dans les conditions qui sont aujourd’hui les nôtres, espérer la démocratie c’est tout comme élever des mouches et en attendre du miel. Nous le savons tous, seules les abeilles sont à même de produire cette exquise douceur …

Béral Mbaïkoubou, Député.